Les droits à payer
La déclaration de succession est-elle obligatoire ?
Oui, sauf pour les toutes petites successions, c'est-à-dire celles dont l'actif brut avant déduction des dettes est inférieur à (CGI art. 800, I) :
- 50 000 € pour les successions en ligne directe, entre époux ou partenaires de Pacs, à condition qu'il n'y ait pas eu de donation non enregistrée ou déclarée (condition qui vise essentiellement les dons manuels) ;
- 3 000 € pour les autres successions.
Au-delà de ces montants, les héritiers ou légataires doivent déposer une déclaration de succession. Il en va ainsi même s'il n'y a aucun droit à payer du fait des abattements et/ou des exonérations applicables, sachant que, dans ce cas, la seule sanction encourue sera une amende de 150 € (à laquelle les héritiers échapperont s'ils déposent la déclaration dans les 30 jours suivant la demande de l'administration).
Savoir
La déclaration peut être souscrite par un seul héritier pour le compte de tous. Chaque légataire doit en revanche déposer une déclaration individuelle, sauf accord sur le principe d'une déclaration unique avec les autres légataires et/ou héritiers (BOI-ENR-DMTG-10-60-20 no 1). Les successeurs peuvent aussi, ensemble ou séparément, donner procuration à un tiers, le plus souvent un notaire, pour souscrire la déclaration à leur place (BOI-ENRDMTG-10-60-20BOI précité no 80).
Son intervention n'est nullement obligatoire et les héritiers et/ou légataires peuvent faire eux-mêmes la déclaration de succession. Ce n'est cependant conseillé que pour les successions simples, qui ne posent de réels problèmes ni d'inventaire de l'actif et du passif, ni d'évaluation, ni de transmission des biens. Si ce n'est pas le cas, mieux vaut recourir à un notaire.
Lorsque le notaire remplit la déclaration pour le compte des successeurs, il facture des honoraires qui s'ajoutent à ceux qui lui sont dus pour ses autres interventions : procès-verbal d'ouverture du testament (pour les testaments olographes), établissement de l'acte de notoriété, de l'attestation immobilière, etc.
Les honoraires facturés par le notaire pour l'établissement de la déclaration de succession sont calculés sur l'actif brut total, y compris sur les biens dépendant de la communauté conjugale du défunt, selon le barème dégressif suivant (montants hors TVA) :
- de 0 à 6 500 € : 1,6 % ;
- de 6 501 € à 17 000 € : 0,88 % ;
- de 17 001 € à 30 000 € : 0,6 % ;
- au-delà de 30 000 € : 0,44 %.
Attention
Les héritiers et légataires doivent veiller au respect du délai de dépôt de la déclaration de succession. Car même s'ils ont donné mandat à un notaire pour établir et déposer la déclaration de succession pour leur compte, ils restent débiteurs des intérêts et pénalités encourus en cas de retard. Il en va ainsi y compris lorsque le retard est dû à la négligence du notaire (par exemple, Cass. com. 29-6-1999 no 97-11.676 : RJF 10/99 no 1299), les héritiers pouvant toutefois se retourner contre le notaire pour obtenir le remboursement des intérêts et pénalités acquittés.
La déclaration de succession doit être souscrite sur des formulaires fournis par l'administration, modèles 2705, 2705-S, 2706 et éventuellement 2705-A (pour les contrats d'assurance-vie) et 2709 (si le défunt était propriétaire d'un ou plusieurs immeubles dépendant d'un autre service des impôts). Les notaires sont autorisés à souscrire la déclaration sur support informatique (BOI-ENR-DMTG-10-60-30 no 1).
Au-delà de 15 000 € d'actif successoral brut (imposable ou non), la déclaration doit être souscrite en double exemplaire (BOI-ENR-DMTG-10-60-30 no 30).
La déclaration est déposée au service des impôts des entreprises (pôle enregistrement) du domicile du défunt (CGI art. 656). Si le défunt n'était pas domicilié en France, la déclaration est à adresser auprès du service des impôts des non-résidents (10 rue du Centre, TSA 50014 - 93465 Noisy-le-Grand Cedex) ou, pour les personnes qui résident habituellement dans la principauté de Monaco, au service des impôts de Menton.
Tout dépend normalement du lieu du décès : la déclaration doit être déposée dans les six mois du décès lorsque celui-ci s'est produit en France métropolitaine, dans l'année qui suit le décès dans le cas contraire (CGI art. 641). Des délais plus longs s'appliquent toutefois lorsque la déclaration comporte des immeubles dont la propriété est incertaine : voir no 30510.
Le décompte du délai se fait de date à date à partir du jour du décès (BOI-ENR-DMTG-10-60-50 no 30). Par exemple, si le décès a eu lieu le 15 avril 2015, le délai de six mois expire le 15 octobre 2015 à minuit. Lorsque le délai part du dernier jour du mois, il arrive à échéance le dernier jour du mois du terme. Si l'échéance tombe un dimanche ou un jour férié, elle est reportée au premier jour ouvrable suivant (CGI art. 648).
L'existence d'un litige sur la succession ne dispense pas les héritiers dont les droits sont contestés de déposer la déclaration de succession dans le délai de six mois (en ce sens, par exemple, Cass. com. 18-11-2011 no 10-25.074 : RJF 2/12 no 178), sachant qu'ils pourront réclamer le remboursement du trop-payé si l'issue du litige leur est défavorable. La situation est différente pour les légataires : pour eux, le point de départ du délai de six mois est reporté à la date de clôture du litige qui établit leurs droits dans la succession. Corrélativement, le délai dont dispose l'administration pour effectuer son contrôle ne démarre qu'à cette même date.
Les successions qui comportent des immeubles ou droits immobiliers situés en Corse bénéficient d'un régime fiscal de faveur. Destiné à encourager le règlement des indivisions successorales, ce régime dérogatoire est temporaire, l'alignement sur les règles de droit commun devant s'opérer d'ici à 2018.
Pour les successions ouvertes entre le 1er janvier 2013 et le 31 décembre 2017, les immeubles ou droits immobiliers situés en Corse sont exonérés de droits de succession à concurrence de la moitié de leur valeur (l'exonération était totale jusqu'au 31 décembre 2012) si les deux conditions suivantes sont réunies (CGI art. 1135 bis) :
- une attestation notariée relative aux immeubles ou droits immobiliers situés en Corse doit être publiée dans les deux ans du décès. Cette condition n'est pas exigée si le droit de propriété du défunt avait été constaté avant son décès par un acte régulièrement transcrit ou publié ;
- si l'immeuble a été acheté par le défunt, l'acquisition doit être antérieure au 23 janvier 2002 (aucune condition de durée de détention si le défunt est devenu propriétaire par donation ou héritage).
A partir de 2018, la taxation sera en principe établie dans les conditions de droit commun. Pour les immeubles qui sont - ou seront - taxables, les règles d'évaluation sont les mêmes qu'en métropole.
L'exonération partielle des immeubles ou droits immobiliers situés en Corse ne vaut que pour les droits de succession. Elle ne s'applique ni aux droits de donation, ni à l'ISF. L'exonération peut, au titre d'une même succession, être cumulée avec celle qui concerne les parcelles indivises non titrées non bâties et de faible valeur (exonération totale mais plafonnée, en vigueur sur l'ensemble du territoire national mais qui concerne en pratique essentiellement les terrains situés en Corse : voir no 30583).
Pour les successions ouvertes depuis le 1er janvier 2013, le délai pour souscrire la déclaration de succession est en principe de six mois (il était fixé à deux ans jusqu'au 31 décembre 2012). Il est porté à deux ans lorsque la déclaration comporte des immeubles pour lesquels le droit de propriété n'a pas été régulièrement constaté avant le décès à condition que les attestations notariées relatives à ces biens soient publiées dans les deux ans du décès (CGI art. 641 bis ; BOI-ENR-DMTG-10-60-50 nos 222 à 226). Dans ce cas, les frais de reconstitution des droits de propriété sont déductibles de l'actif successoral : voir no 30703. Ces deux mesures concernent l'ensemble des immeubles situés sur le territoire national dont le titre de propriété est incertain (ceux pour lesquels le droit de propriété n'est pas constaté par un acte régulièrement transcrit et publié) ; elles ne sont donc pas réservées aux immeubles situés en Corse même si en pratique elles les concernent essentiellement.
La déclaration doit contenir tous les éléments nécessaires au calcul et au contrôle des droits de succession et notamment (BOI-ENR-DMTG-10-60-30 nos 50 à 100) :
- l'identification des héritiers et légataires et de leurs enfants, avec indication de leur degré de parenté avec le défunt ;
- le cas échéant, le contenu du testament ;
- si le défunt était marié, les dispositions de son contrat de mariage (ou la mention qu'il n'y a pas eu de contrat) ;
- si le défunt était pacsé, la justification du Pacs (attestation d'inscription au greffe du tribunal) ;
- le cas échéant, les donations antérieures effectuées par le défunt au profit de ses héritiers ou légataires ;
- le cas échéant, les contrats d'assurance en cas de vol ou incendie souscrits pour couvrir les bijoux, pierres précieuses, objets d'art ou de collection ;
- le cas échéant, les contrats d'assurance-vie pour lesquels des primes ont été payées après 70 ans ;
- l'énumération et l'estimation détaillée des biens du défunt, même non imposables, et de ses dettes.
Si elle est déposée par les héritiers et/ou légataires eux-mêmes, la déclaration s'achève obligatoirement par une affirmation de sincérité (CGI art. 802).
Si le défunt était marié sous un régime de communauté, la déclaration doit faire ressortir la part de communauté qui revient au défunt (celle revenant au conjoint survivant n'étant pas taxable). Pour cela, il faut déterminer l'actif de la communauté en tenant compte, le cas échéant, des sommes dont celle-ci peut être créancière ou débitrice vis-à-vis du patrimoine propre des époux. La part de communauté revenant au défunt est ensuite ajoutée à ses biens propres pour le calcul des droits de succession (sachant que la part que recueille le conjoint survivant dans la succession est exonérée de droits).
La souscription d'une déclaration de succession incomplète peut être sanctionnée, en l'absence de régularisation, par la taxation d'office (Cass. com. 14-2-2012 no 11-10.765 : RJF 5/12 no 536). Sur cette procédure, voir no 30524.
Décès le 15 mai 2015 de Monsieur Pierre Durand, marié sous le régime de la communauté légale, qui laisse deux enfants : sa fille Jeanne, épouse Martin, mère de trois enfants, et son fils Paul, célibataire. Il n'y a pas de testament et il n'a pas été fait de donation au dernier vivant. La veuve, Madame Pierre Durand, a opté pour l'usufruit de la totalité des biens. Aucune donation antérieure n'est rapportable à l'actif taxable. Une récompense de 60 000 € est due par Madame veuve Durand à la communauté, correspondant à une dette propre qui a été remboursée par des fonds communs.
1. Déclaration préalable : selon les indications de l'imprimé |
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2. Liquidation des reprises et récompenses Récompense due par Mme Durand à la communauté Autres reprises ou récompenses : néant |
60 000 € |
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3. Liquidation de la communauté a. Actif de communauté A détailler et chiffrer. Exemple : |
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Solde créditeur du compte bancaire ouvert dans tel établissement au nom du défunt |
19 000 € |
Un véhicule automobile mis en circulation le..., immatriculé..., genre VP, marque..., type..., d'une valeur au jour du décès de |
1 000 € |
Un appartement de six pièces, dépendant d'un immeuble situé à... dont il constitue le lot no ... et comprenant : cuisine, etc. et les... millièmes des parties communes ; évalué au jour du décès à |
1 220 000 € |
Excédent des récompenses dues à la communauté |
60 000 € |
Total de l'actif de communauté (par hypothèse) |
1 300 000 € |
b. Passif de communauté A détailler et chiffrer. Exemple : Impôts dus, estimés comme suit : Impôt sur le revenu au titre de... Taxe foncière au titre de... pour l'appartement..., etc. Sommes dues à la copropriété pour charges courues non payées au jour du décès |
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Total du passif de communauté (par hypothèse) c. Balance L'actif net de communauté revenant pour moitié à chaque époux s'élève à |
80 000 € 1 220 000 € |
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4. Liquidation de la succession a. Actif de succession A détailler et chiffrer. Exemple : |
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La moitié de l'actif net de communauté : |
610 000 € |
Une maison située à..., cadastrée section... pour une superficie de..., évaluée |
250 000 € |
Les meubles meublants évalués forfaitairement, à défaut d'inventaire, à 5 % de l'actif brut de succession, soit : |
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1 300 000 € / 2 (part du défunt dans l'actif brut de communauté) + 250 000 € (biens propres) × 5 % = |
45 000 € |
Total de l'actif de succession |
905 000 € |
b. Passif de succession A détailler et chiffrer. Exemple : |
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Taxe foncière au titre de... due pour la maison de..., estimée |
2 500 € |
Frais d'obsèques d'un montant de... déductibles à concurrence de |
1 500 € |
Total du passif de succession (par hypothèse) |
4 000 € |
c. Balance |
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L'actif net de succession s'élève à |
901 000 € |
Se répartissant comme suit : |
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Madame Pierre Durand, héritière de la totalité des biens en usufruit. |
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Valeur de l'usufruit (usufruitière âgée de 72 ans) = 30 %, soit |
270 300 € |
Madame Jeanne Martin : 1/2 de (901 000 € - 270 300 €) |
315 350 € |
M. Paul Durand : même montant soit |
315 350 € |
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5. Calcul des droits Madame Pierre Durand |
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Part recueillie : 270 300 € (conjoint survivant exonéré) |
0 € |
Madame Jeanne Martin Part recueillie : 315 350 € Abattement personnel : 100 000 € Imposable : 215 350 € |
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Droits : (215 350 € × 0,20) - 1 806 € = |
41 264 € |
Réduction pour trois enfants : 610 € |
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Dû |
40 654 € |
Monsieur Paul Durand Part recueillie : 315 350 € Abattement personnel : 100 000 € Imposable : 215 350 € |
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Droits : (215 350 € × 0,20) - 1 806 € = |
41 264 € |
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« Le déclarant affirme sincère et véritable la présente déclaration (...) » A..., le... |
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Il faudra acquitter à la fois un intérêt de retard et une majoration, tous deux calculés sur le montant des droits qui sont dus. Ainsi qu'on le verra plus loin, il est toutefois possible de demander la réduction ou la remise de ces pénalités par un recours dit gracieux.
L'intérêt de retard, au taux de 0,40 % par mois, est décompté du 1er jour du mois qui suit celui au cours duquel la déclaration aurait dû être déposée jusqu'au dernier jour du mois au cours duquel le dépôt intervient effectivement (CGI art. 1727, IV-1). Prenons l'exemple de Monsieur Lebleu qui a hérité de son père, décédé le 15 janvier 2014. Les droits dus sont par hypothèse de 150 000 €. Monsieur Lebleu n'a déposé la déclaration de succession que le 26 avril 2015. L'intérêt de retard est dû pour la période qui va du 1er août 2014 au 30 avril 2015, soit neuf mois. Montant dû : 150 000 € × 3,60 % = 5 400 €.
Une majoration s'ajoute à l'intérêt de retard mais n'est encourue que si le retard excède six mois. Son taux est de 10 %, porté à 40 % lorsque la déclaration de succession n'a pas été déposée dans les 90 jours suivant la réception d'une mise en demeure (CGI art. 1728, 2). En pratique, l'administration n'adresse pas de mise en demeure avant l'expiration d'un délai d'un an après le décès (BOI-CF-INF-10-20-10 no 60).
La majoration est de 5 % si seul le paiement est tardif, la déclaration étant souscrite dans les délais (CGI art. 1731 ; BOI-CF-INF-10-30 no 150).
Conseil
Si un retard est prévisible dans le dépôt de la déclaration de succession, vous avez tout intérêt à verser des acomptes sur le montant des droits : l'administration en tiendra compte et les déduira de la base de calcul de l'intérêt de retard et de la majoration de 10 %. Il en va différemment pour la majoration de 40 % mais, en ce qui la concerne, l'héritier de bonne foi peut aussi obtenir la prise en considération des acomptes par voie de demande gracieuse (BOI-CF-INF-10-20-10 no 60).
Le retardataire qui ne régularise pas la situation dans les 90 jours de sa mise en demeure encourt la taxation d'office. Peu importe qu'il ait déjà versé des acomptes sur les droits de succession (BOI-ENR-DMTG-10-60-50 no 230). Cette procédure permet à l'administration de fixer elle-même le montant taxable, sans discussion préalable avec l'héritier. Si ce dernier conteste l'imposition devant les tribunaux, c'est lui qui devra prouver le caractère excessif des rectifications apportées.
Sauf exonération spéciale, tous les biens appartenant au défunt sont imposables.
Il faut également tenir compte de dispositions fiscales particulières qui édictent diverses présomptions de propriété, dont certaines sont importantes en pratique. C'est ainsi par exemple que, sauf preuve contraire, celui qui paie la taxe foncière d'un immeuble est présumé en être le propriétaire.
Nous examinons ci-après les principales présomptions fiscales de propriété.
Lorsque le défunt était usufruitier d'un bien, le nu-propriétaire de ce bien en acquiert la pleine propriété du seul fait du décès. En principe, la réunion de l'usufruit à la nue-propriété ne donne ouverture à aucun droit de succession (CGI art. 1133).
Mais il en va parfois autrement, du fait de la présomption de propriété posée par l'article 751 du Code général des impôts. Il résulte de cet article que les biens dont le défunt avait l'usufruit et qui appartenaient en nue-propriété à ses héritiers présomptifs (même renonçants ou déshérités par testament) ou à leurs descendants, à ses donataires ou légataires ou à des personnes réputées interposées (conjoint, descendants et les deux parents du nu-propriétaire) sont présumés être la pleine propriété du défunt. La présomption s'applique, par exemple, lorsque le propriétaire d'un immeuble en a vendu la nue-propriété aux parents de son légataire universel (Cass. com. 12-7-2011 no 10-18.471 : RJF 11/11 no 1242) ou en a donné la nue-propriété au fils de sa fille adoptive, laquelle était également sa légataire universelle (CA Bordeaux 12-9-2012 no 10/06635).
Au décès de l'usufruitier, le nu-propriétaire devra acquitter des droits de succession sur la valeur en pleine propriété de ces biens. S'il a acquis la nue-propriété du défunt (cas de la donation ou de la vente avec réserve d'usufruit), le nu-propriétaire pourra toutefois déduire les droits qu'il a acquittés lors de la donation ou de la vente (CGI art. 751, al. 4). En cas de donation avec réserve d'usufruit, l'imputation des droits de donation est possible même lorsque ces droits ont été réglés par le donateur. Mais alors, leur montant devra figurer à l'actif de la succession (BOI-ENR-DMTG-10-10-40-10 no 100) : voir l'exemple donné no 30555.
La présomption de propriété ne concerne que l'usufruit au sens strict. Elle ne s'applique pas au décès de celui qui était titulaire d'un droit d'usage et d'habitation sur un bien immobilier. Elle ne s'applique pas non plus lorsque le démembrement de propriété résulte (BOI-ENR-DMTG-10-10-40-10 no 70) :
- d'une donation - donation simple ou donation-partage - de la nue-propriété régulièrement effectuée plus de trois mois avant le décès. En d'autres termes, la présomption ne joue que si le donateur est décédé dans les trois mois de la donation ;
- d'une donation par contrat de mariage, sans condition de délai ;
- d'un héritage ou d'un legs par lequel l'usufruit a été attribué au défunt de son vivant et la nue-propriété à ses héritiers présomptifs.
Lorsqu'elle est applicable, il est possible de faire échec à la présomption en prouvant que le démembrement de propriété était réel et sincère (CGI art. 751, al. 2). S'agissant d'une vente, l'héritier doit prouver qu'il a réellement acheté et payé la nue-propriété avec ses fonds personnels (ou avec des fonds qui lui ont été donnés, à condition que la donation ait été passée par acte notarié ou ait été enregistrée, que l'acquisition de la nue-propriété ait eu lieu plus de trois mois avant le décès de l'usufruitier et que l'acte d'acquisition mentionne l'origine des fonds). S'agissant d'une donation avec réserve d'usufruit (par hypothèse réalisée moins de trois mois avant le décès du donateur), il faut établir que le décès « prématuré » du donateur était imprévisible au moment de la donation (décès accidentel, par exemple : Cass. com. 17-1-2012 no 10-27.185 : RJF 4/12 no 425).
Monsieur Petit, âgé de 67 ans, est décédé le 15 mai 2015 en laissant pour unique héritier son fils Patrick. Le 28 mars 2015, il lui avait fait donation de la nue-propriété de son appartement d'une valeur en pleine propriété de 300 000 €, s'en réservant l'usufruit sa vie durant. C'est lui qui a pris en charge le paiement des droits de donation. A son décès, il laisse des biens d'une valeur de 150 000 €. Lors de la donation, Monsieur Petit a acquitté les droits sur la valeur en nue-propriété de l'appartement, soit sur 180 000 € (60 % de sa valeur en pleine propriété compte tenu de son âge). Après application de l'abattement en ligne directe de 100 000 € et du tarif en ligne directe, les droits se sont élevés à 14 194 €. Monsieur Petit étant décédé dans les trois mois de la donation, la présomption de l'article 751 du Code général des impôts s'applique. Les droits de succession sont calculés sur : l'appartement donné à son fils (300 000 €), les biens existant à son décès (150 000 €) et le montant des droits acquittés par lui lors de la donation (14 194 €), soit un actif de 464 194 €. Après application de l'abattement personnel de 100 000 € et du tarif en ligne directe, les droits dus par Patrick Petit s'élèvent à 71 033 €, dont il y a lieu de déduire les droits acquittés par le défunt lors de la donation (14 194 €), soit une somme à payer de 56 839 €.
Les titres, sommes ou valeurs figurant sur des comptes joints sont censés appartenir aux déposants par parts égales. Il en est de même des sommes, titres ou objets trouvés dans un coffre-fort loué conjointement par plusieurs personnes (CGI art. 753 et CGI754).
Il est possible de combattre ces présomptions.
L'administration fiscale peut majorer la part taxable aux droits de succession en prouvant que la part du défunt excédait 50 %. Elle est par exemple en droit de réintégrer à la succession du mari séparé de biens la totalité du solde des comptes joints des époux lorsque le mari décédé, qui disposait d'un patrimoine propre, était le seul des deux époux à exercer une activité rémunérée et à alimenter les comptes du couple (Cass. com. 19-1-2010 no 09-12.140 : RJF 5/10 no 541).
De son côté, l'héritier ou légataire peut prouver que le défunt possédait moins de la moitié des sommes, titres, etc., figurant sur le compte joint ou même qu'il n'avait aucun droit sur le compte. Cependant, cette preuve est difficile à apporter, parce qu'elle ne peut résulter que des indications du contrat avec la banque ou d'actes ayant acquis date certaine avant le décès.
Les valeurs mobilières, parts sociales et créances, y compris les comptes bancaires, sont présumés faire partie de la succession lorsque, moins d'un an avant son décès, le défunt en a eu la propriété, en a perçu les revenus ou a effectué une opération quelconque s'y rattachant (CGI art. 752).
L'administration dispose d'une procédure spécifique pour demander des éclaircissements ou des justifications au sujet des biens concernés par cette présomption : voir no 30866.
La présomption de propriété posée par l'article 752 du Code général des impôts supporte la preuve contraire, qui peut notamment résulter de la vente des biens avant le décès. Attention toutefois : si l'acheteur est un héritier ou l'une des personnes visées à l'article 751 (voir no 30553), la présomption n'est écartée que si la vente a acquis date certaine avant le décès (CGI art. 752, al. 2). Il faut donc que la vente ait été passée devant notaire ou enregistrée avant le décès ou que l'acheteur soit lui-même mort avant l'ouverture de la succession.
S'agissant de sommes d'argent, les retraits opérés sur le compte bancaire, même moins d'un an avant le décès, constituent la preuve contraire à la présomption : les sommes retirées n'ont pas à figurer dans l'actif successoral. Cependant, le fisc peut quand même taxer les sommes en cause s'il démontre que l'argent a été conservé par l'auteur du retrait jusqu'à son décès (dans ce cas, la procédure spécifique de demande d'éclaircissements ou de justifications mentionnée ci-avant ne s'applique pas). Cette preuve résulte généralement d'un faisceau d'indices : âge élevé du titulaire du compte, importance de la somme retirée par rapport à ses dépenses habituelles, absence d'emploi de la somme, etc. (pour une illustration, Cass. com. 12-10-2010 no 09-68.401 : RJF 2/11 no 244). L'administration n'a pas à prouver que l'argent a été appréhendé par les héritiers ou légataires (notamment, Cass. com. 15-5-2012 no 11-16.027 : RJF 8-9/12 no 877) ; elle n'a pas non plus à faire la preuve de la non-appréhension de l'argent retiré par des personnes étrangères à la succession.
Les règles actuellement applicables sont les suivantes.
Si le défunt était domicilié en France, tous ses biens doivent être soumis aux droits de succession, y compris en principe ses biens situés à l'étranger, sauf clauses contraires des conventions internationales (CGI art. 750 ter, 1o ). La double imposition est évitée par l'imputation des droits payés à l'étranger sur ceux dus en France sur les biens étrangers (CGI art. 784 A).
Si le défunt était domicilié à l'étranger, seuls ses biens français sont en principe imposables en France. Cependant, si l'héritier ou le légataire est domicilié en France au jour du décès et l'a été pendant au moins six ans, continus ou non, au cours des dix années précédentes, les biens reçus par cet héritier ou légataire sont imposables en France même s'ils sont situés à l'étranger (CGI art. 750 ter, 3o ). L'application de cette règle est cependant loin d'être générale, car les conventions internationales conclues par la France excluent sauf exception l'imposition des biens étrangers par la France lorsque le défunt est domicilié à l'étranger.
A noter que, pour les successions internationales intéressant les Etats membres de l'Union européenne, les règles françaises actuelles de territorialité des droits devraient prochainement évoluer. La Commission européenne a en effet invité les Etats qui réservent un traitement différent selon le pays de situation des biens et/ou de domiciliation du défunt et/ou de l'héritier à rendre leur législation conforme aux principes de non-discrimination et de libre circulation (Recommandation C/2011/8819 et Communiqué de presse de la Commission européenne du 15 décembre 2011).
Les biens de succession considérés comme situés à l'étranger se définissent par opposition aux biens situés en France, lesquels sont les suivants :
- biens, tels les immeubles, les meubles corporels et les fonds de commerce, qui ont en France leur assiette matérielle. Sont imposables les immeubles ou droits immobiliers qui étaient détenus en France par le défunt domicilié à l'étranger via une société ou un autre organisme dont il détenait directement ou indirectement plus de la moitié des actions, parts sociales ou droits (les immeubles affectés par la société à sa propre exploitation ne sont pas pris en compte) ;
- biens incorporels français : créances sur un débiteur domicilié en France, valeurs mobilières émises par les sociétés ayant leur siège en France ou des organismes publics français, brevets ou marques concédés ou exploités en France ;
- actions ou parts de sociétés étrangères non cotées et dont l'actif est constitué pour plus de 50 % d'immeubles ou de droits immobiliers situés en France, à proportion de la valeur de ces biens par rapport à l'actif total de la société. Les immeubles affectés par la société à sa propre exploitation (industrielle, commerciale, etc.) ne sont pas pris en compte pour l'appréciation du pourcentage de 50 %.
Nous examinons ci-après les principales exonérations applicables en matière de droits de succession.
Signalons pour mémoire :
- l'exonération dont bénéficient les sommes versées au titre des contrats d'assurance-vie lors du décès de l'assuré. Lorsqu'elles sont versées à un bénéficiaire désigné, ces sommes ne font pas partie de la succession de l'assuré et échappent à toute taxation. L'exonération est totale pour les contrats souscrits au profit du conjoint ou partenaire de Pacs survivant, de certains organismes sans but lucratif et, sous certaines conditions, des frères et soeurs (voir ci-après no 30576). Ce régime de faveur est toutefois doublement limité lorsque les sommes sont versées à d'autres bénéficiaires : d'une part, les primes versées après 70 ans sont soumises aux droits de succession pour la fraction excédant 30 500 € si le contrat a été souscrit depuis le 20 novembre 1991, d'autre part, un prélèvement spécifique est dû sur les sommes excédant 152 500 € par bénéficiaire lorsque ces sommes correspondent à des primes versées depuis le 13 octobre 1998 (le montant du prélèvement est de 20 % jusqu'à 700 000 €, 31,25 % au-delà). En l'absence de bénéficiaire déterminé, les sommes versées font partie de la succession de l'assuré et sont taxables aux droits de succession dans les conditions de droit commun ;
- l'exonération de 75 % prévue sous certaines conditions en faveur des titres de sociétés exerçant une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale ayant fait l'objet d'un engagement collectif de conservation (engagement Dutreil) (CGI art. 787 B) ;
- l'exonération temporaire et partielle de certains immeubles et droits immobiliers en Corse : voir ci-avant no 30510.
Le conjoint survivant et le partenaire de Pacs survivant sont totalement exonérés de droits de succession (CGI art. 796-0 bis).
Sont également exonérés en totalité les frères et soeurs qui remplissent les conditions suivantes (CGI art. 796-0 ter) :
- être célibataire, veuf, divorcé ou séparé de corps au moment du décès ;
- toujours au moment du décès, avoir plus de 50 ans ou être atteint d'une infirmité mettant dans l'impossibilité de subvenir par son travail aux nécessités de l'existence ;
- avoir constamment vécu avec le défunt pendant les cinq années qui ont précédé le décès. Par mesure de tempérament, l'administration fiscale accorde l'exonération lorsque la cohabitation a cessé pour des raisons de santé (hospitalisation, placement en maison médicalisée, etc.), à condition qu'elle ait duré au moins cinq ans à la date à laquelle le logement commun a été quitté (BOI-ENR-DMTG-10-20-10 no 50).
Rappelons par ailleurs que les personnes dispensées de déposer la déclaration (successions de très faible montant : voir no 30500) sont de fait exonérées de droits.
Les logements qui ont été acquis de juin 1993 à décembre 1996 peuvent bénéficier, lors de leur première transmission, d'une exonération de droits de succession, selon des modalités qui varient en fonction de leur nature et de leur date d'acquisition :
- logements acquis neufs au cours de la période 1er juin 1993-31 décembre 1994 et de la période 1er août 1995-31 décembre 1995 : exonération plafonnée à 46 000 € par héritier ou légataire. L'exonération s'applique à condition que le logement ait servi à l'habitation principale du propriétaire, de son locataire ou même d'un occupant à titre gratuit, pendant une certaine durée après son acquisition. Pour les logements acquis du 1er août 1995 au 31 décembre 1995, il faut en plus que l'héritier ou le légataire s'engage à affecter le logement à l'habitation pendant au moins trois ans après le décès du défunt ;
- logements locatifs acquis achevés depuis plus de cinq ans entre le 1er août 1995 et le 31 décembre 1996 : exonération des 3/4 de la valeur du bien et plafonnée à 46 000 €, si le logement a été loué à titre d'habitation principale pour au moins neuf ans et sous certaines conditions de loyer et de ressources du locataire.
L'exonération des logements acquis de 1993 à 1996 se cumule avec les abattements de droit commun, qui s'appliquent sur la fraction non couverte par l'exonération. Aucun cumul n'est en revanche possible lorsque l'acquéreur a bénéficié d'une réduction d'impôt pour investissement immobilier.
Sont exonérés :
- les bois et forêts, les parts de groupements forestiers et de sociétés d'épargne forestière, à concurrence de 75 % de leur montant, si certaines conditions sont réunies, dont un engagement d'exploiter pendant 30 ans les bois et forêts transmis (CGI art. 793, 2-2o ). Les sommes déposées sur un compte d'investissement forestier (Cifa) bénéficient également d'une exonération de 75 % ;
- les biens ruraux donnés par bail à long terme ou par bail cessible hors du cadre familial et les parts de groupements fonciers agricoles, à concurrence de 75 % de leur valeur jusqu'à 101 897 € par bénéficiaire et de 50 % au-dessus de ce seuil (CGI art. 793, 2-3o et CGI793 bis, al. 2). Le bénéficiaire doit rester propriétaire des biens pendant cinq ans. Pour les parts de groupements fonciers agricoles (GFA), l'exonération ne s'applique qu'à la fraction de la valeur nette des parts correspondant aux biens donnés par bail à long terme ou par bail cessible hors du cadre familial et elle est soumise à certaines conditions, dont une condition de délai de détention de deux ans, applicable sauf exception (CGI art. 793, 1-4o et CGI793 bis). Les donations de biens ruraux ou parts de GFA sont également exonérées de droits à condition, si le bénéficiaire de la donation est le preneur ou l'un de ses proches parents, que le bail ait été consenti au moins deux ans avant la donation (CGI art. 793 bis, al. 2) ;
- les parts de groupements fonciers ruraux. Ces parts sont soumises (CGI art. 848 bis) : pour leur fraction représentative de biens de nature forestière, aux dispositions applicables aux parts de groupements forestiers ; pour leur fraction représentative de biens de nature agricole, aux dispositions applicables aux parts de GFA.
A concurrence de 75 % de leur valeur, les entreprises individuelles ayant une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale sont exonérées de droits de succession lorsque les conditions suivantes sont réunies (CGI art. 787 C) :
- si l'entreprise avait été achetée par le défunt, il doit en avoir été propriétaire pendant deux ans (aucune durée de détention n'est requise si le défunt a créé l'entreprise ou l'a reçue par donation ou succession). En revanche, l'exploitation de l'entreprise par le défunt au jour de son décès n'est pas nécessaire (Cass. com. 10-9-2013 no 12-21.140 : RJF 12/13 no 1180 ; BOI-ENR-DMTG-10-20-40-40 no 30) ;
- tous les héritiers ou légataires doivent s'engager dans la déclaration de succession à conserver pendant quatre ans les biens affectés à l'exploitation de l'entreprise. Ils peuvent toutefois donner les biens à leurs propres descendants, si ceux-ci poursuivent l'engagement de conservation jusqu'à son terme (BOI-ENR-DMTG-10-20-40-40 no 80) ;
- l'un des héritiers ou légataires doit poursuivre l'exploitation pendant trois ans.
Attention
Les sanctions sont sévères si l'obligation de poursuivre l'exploitation pendant trois ans n'est pas respectée : tous les héritiers et légataires ayant bénéficié de l'exonération seront redressés. Ils devront acquitter le complément de droits et l'intérêt de retard de 0,40 % par mois.
Si un héritier ou légataire ne conserve pas les biens pendant quatre ans, lui seul sera redressé. Il devra acquitter le complément de droits et l'intérêt de retard dans le mois qui suit la rupture de l'engagement (CGI art. 1840 G ter).
Sont exonérés (liste non exhaustive) :
- les monuments historiques ayant fait l'objet d'une convention spéciale avec l'administration (CGI art. 795 A et CGI ann. IIIann. III art. 281 bis). S'ils sont détenus par l'intermédiaire d'une société civile immobilière, les parts de la société ouvrent droit à l'exonération, sous certaines conditions ;
- les rentes ou indemnités versées ou dues au défunt en réparation de dommages corporels consécutifs à une maladie ou à un accident (CGI art. 775 bis). L'argent reçu par la victime (ou qui sera versé à ses héritiers) est déduit de l'actif successoral pour son montant nominal. Par exemple, si la victime a reçu de son vivant une indemnité de 100 000 € avec laquelle elle a acheté un bien valant 120 000 € le jour de son décès, il faudra porter 120 000 € à l'actif de la succession et 100 000 € au passif. Les indemnités versées aux ayants droit de la victime en réparation de leur préjudice moral ou économique sont déductibles de l'actif successoral de leur propre succession (BOI-ENR-DMTG-10-20-10 no 210) ;
- pour la part revenant à certains héritiers (notamment les enfants), les successions des victimes de guerre ou d'actes de terrorisme, celles des pompiers décédés en opérations de secours et cités à l'ordre de la Nation, celles des militaires décédés en opération extérieure et, s'ils ont été cités à l'ordre de la Nation, celles des policiers, militaires (hors opération extérieure) et agents des douanes décédés dans l'accomplissement de leur mission (CGI art. 796) ;
- pour 75 % de leur valeur, sous certaines conditions, les propriétés non bâties situées dans les espaces naturels protégés (sites Natura 2000 et réserves naturelles, par exemple) (CGI art. 793, 2-7o ) ;
- pour 30 % de leur valeur, sous certaines conditions, lors de leur première mutation à titre gratuit, les immeubles dont le titre de propriété est reconstitué entre le 1er octobre 2014 et le 31 décembre 2017(CGI art. 793, 2-8o issu de l'article 15 de la loi 2014-1654 du 29-12-2014 applicable aux transmissions réalisées depuis le 1-1-2015). Cette exonération est en vigueur sur l'ensemble du territoire national mais concerne en pratique essentiellement les immeubles situés en Corse ;
- les réversions de rentes viagères entre parents en ligne directe (CGI art. 793, 1-5o ) ;
- les parcelles non bâties indivises de faible valeur dont le droit de propriété n'est pas régulièrement constaté, sous certaines conditions (CGI art. 797 ; BOI-ENR-DMTG-10-20-30-130 nos 1 à 70). Cette exonération ne vaut que pour les droits de succession. Elle ne s'applique pas aux droits de donation ;
- les dons et legs consentis à l'Etat, aux collectivités territoriales, aux établissements publics scientifiques et d'enseignement, ainsi qu'à divers organismes ayant un but exclusif d'assistance et de bienfaisance (CGI art. 1040, I) ;
- les dons et legs consentis aux associations ou aux fondations, reconnues d'utilité publique, dont les ressources sont affectées à des oeuvres d'assistance, à la défense de l'environnement naturel ou à la protection des animaux (CGI art. 795, 4o ) ; les dons et legs consentis aux associations déclarées dont les ressources sont exclusivement affectées à la recherche médicale ou scientifique à caractère désintéressé (CGI art. 795, 2o ) ;
- les dons et legs faits aux fondations universitaires, aux fondations partenariales et établissements publics d'enseignement supérieur reconnus d'utilité publique (CGI art. 795, 5o ) ;
- les dons et legs à certains fonds de dotation (CGI art. 795, 14o ).
Les dons et legs mentionnés ci-dessus sont également exonérés lorsqu'ils sont consentis à des organismes agréés dont le siège est situé dans un Etat membre de l'Union européenne, en Islande, en Norvège ou au Liechtenstein sous réserve qu'ils soient affectés à des activités similaires à celle des organismes français (CGI art. 795-0 A issu de l'article 61 de la loi 2014-1655 du 29-12-2014 applicable aux dons et legs consentis depuis le 31-12-2014).
Les biens transmis sont estimés par les héritiers ou légataires pour leur valeur à la date du décès.
La valeur totale des biens imposables représente l'actif brut successoral. Cet actif brut est ensuite diminué des dettes du défunt pour obtenir l'actif net taxable.
C'est en principe la valeur vénale réelle qui doit être retenue, c'est-à-dire le prix auquel le bien aurait pu être vendu le jour du décès. Elle correspond au prix que le jeu normal de l'offre et de la demande permettrait au propriétaire de retirer de la vente d'un bien déterminé, à un moment donné, compte tenu des données du marché, des particularités physiques, juridiques et économiques de ce bien, abstraction faite de toute valeur de convenance.
Un bien doit en principe être évalué selon la méthode d'estimation par comparaison (notamment, Cass. com. 10-12-2013 no 12-28.421 : RJF 4/14 no 401). Pour un immeuble, par exemple, on se référera aux prix de vente constatés dans des transactions intervenues avant le décès et portant sur des biens similaires à celui qui appartenait au défunt. Les transactions intervenues après ne sont, en principe, pas prises en compte (notamment, Cass. com. 22-10-2013 no 12-24.034 : RJF 2/14 no 192). Faute d'élément de comparaison antérieur ou concomitant au décès, une décision isolée de la Cour de cassation a toutefois admis qu'une cour d'appel prenne en considération une transaction postérieure au décès de quelques mois (Cass. com. 16-4-2013 no 12-16.266 : RJF 8-9/13 no 879, solution rendue à propos d'un immeuble atypique).
Si la méthode par comparaison est inapplicable, faute de transactions portant sur des biens comparables, d'autres méthodes peuvent être utilisées pour évaluer le bien (évaluation par le revenu pour un immeuble, par exemple). L'utilisation de ces autres méthodes ne peut intervenir qu'à titre subsidiaire (par exemple, Cass. com. 7-7-2009 no 08-14.855 : RJF 12/09 no 1173).
Certains biens sont affectés de facteurs de dépréciation qui influent sur leur valeur vénale. C'est le cas notamment des biens détenus en indivision. La valeur vénale de droits indivis est spécifique et ne se confond pas avec la fraction de la valeur totale correspondant aux droits indivis (par exemple, pour des droits immobiliers indivis, Cass. com. 19-6-1990 no 89-10.394 : RJF 8-9/90 no 1130, solution rendue pour l'ancien impôt sur les grandes fortunes mais transposable aux droits de succession). En pratique, faute de transactions portant sur des droits indivis affectant un bien similaire à celui qui est transmis, le bien est évalué comme s'il n'était pas en indivision et sa valeur est ensuite diminuée par l'application d'une décote, laquelle est répercutée sur la quote-part de droits transmis (pour une illustration, CA Paris 11-3-2010 no 09/03451, ch. 5-7). Attention toutefois : si une décote est possible lorsque la transmission porte sur des droits indivis, il n'en va pas de même lorsque la transmission porte sur l'entière propriété du bien, lequel est recueilli en indivision par les héritiers. L'état d'indivision dans lequel se trouvent les héritiers sur la pleine propriété du bien reçu par succession n'affecte pas la valeur de ce bien au jour de sa transmission (Cass. com. 20-3-2007 no 05-17.139 : RJF 7/07 no 855).
Par exception au principe d'évaluation à la valeur vénale réelle, la loi prévoit pour certains biens des règles spécifiques d'évaluation, auxquelles il est obligatoire de se conformer. Ce sont ces règles que nous examinons ci-après.
Attention
La sous-évaluation d'un bien fait bien sûr encourir un risque de redressement de droits de succession aux héritiers ou légataires. Elle peut également être pénalisante en cas de revente, puisque la plus-value sera calculée sur la base d'un prix de revient sous-évalué, sauf à déposer - suffisamment longtemps avant la revente - une déclaration de succession rectificative. Une déclaration rectificative souscrite après la promesse de vente ou (pire !) après la vente serait inefficace, l'administration étant en droit de calculer la plus-value sans tenir compte de la valeur rectifiée.
La sous-évaluation peut également se retourner contre l'héritier s'il est exproprié, car sa déclaration lui est opposable. Il en est de même lorsque l'administration exerce son droit de préemption pour les biens situés dans certains secteurs et notamment dans les zones où s'exerce le droit de préemption urbain.
La valeur vénale réelle d'un immeuble qui était occupé par son propriétaire à la date de son décès est réputée égale à sa valeur libre de toute occupation (CGI art. 761, al. 2). Par exception, un abattement de 20 % s'applique sur la valeur vénale « libre » de la résidence principale du défunt si, à la date de son décès, le défunt vivait avec son conjoint ou partenaire de Pacs ou avec un ou plusieurs de ses enfants ou de ceux de son conjoint ou partenaire (enfants mineurs, enfants majeurs protégés ou incapables de travailler dans des conditions normales de rentabilité du fait d'une infirmité physique ou mentale) (CGI art. 764 bis). A défaut, et notamment si le défunt vivait seul, l'abattement au titre de la résidence principale n'est pas applicable. L'administration fiscale admet néanmoins l'application de l'abattement si l'immeuble n'était pas occupé au jour du décès pour des raisons involontaires : hospitalisation ou séjour temporaire dans une maison de repos (BOI-ENR-DMTG-10-40-10-30 no 70).
Une autre règle dérogatoire d'évaluation concerne les immeubles ayant fait l'objet d'une adjudication publique dans les deux années précédant ou suivant le décès : les droits de succession ne peuvent sauf exception être calculés sur une somme inférieure au prix d'adjudication majoré de toutes les charges en capital (CGI art. 761, al. 3).
Le conjoint survivant bénéficie de deux droits successifs sur le logement qui constitue son habitation principale à l'époque où il devient veuf : droit de rester gratuitement dans les lieux pendant un an, possibilité ensuite de bénéficier jusqu'à sa mort d'un droit d'habitation assorti d'un droit d'usage sur le mobilier. Le conjoint lui-même n'est pas imposable, mais ces droits peuvent avoir une incidence sur la détermination de l'actif successoral, et donc sur le calcul de l'impôt de succession qui sera dû par les autres héritiers du défunt, notamment ses enfants.
Ce droit est déductible de l'actif successoral lorsqu'il s'exécute en espèces, par remboursement au conjoint des loyers ou de l'indemnité d'occupation qu'il a payés : le montant effectivement remboursé au conjoint survivant est déductible de l'actif taxable (CGI art. 775 quater). Compte tenu du délai de dépôt de la déclaration de succession (en principe dans les six mois du décès) et de la durée du droit temporaire (un an), les sommes non encore remboursées lors du dépôt de la déclaration peuvent être déduites sous forme de provision, quitte à ce qu'une déclaration rectificative soit souscrite par la suite si nécessaire, par exemple si le conjoint quitte le logement avant la fin des douze mois.
Aucune déduction n'est en revanche possible lorsque le droit temporaire s'exécute en nature, c'est-à-dire lorsque le conjoint survivant occupe le logement qui était la propriété du défunt (ou un bien commun ou indivis aux deux époux). Telle est du moins la position de l'administration fiscale (BOI-ENR-DMTG-10-40-20-10 no 140), qui reste à confirmer par les tribunaux.
En matière d'ISF, le conjoint n'a pas à déclarer la valeur de son droit temporaire. Lorsque le logement appartenait au défunt et que ses héritiers sont imposables sur la valeur du logement occupé par le conjoint, l'administration leur accorde le bénéfice de l'abattement de 30 % attaché à la résidence principale (BOI-PAT-ISF-30-50-10 no 110).
Passé l'année de son veuvage, le conjoint survivant bénéficie jusqu'à sa mort d'un droit d'habitation assorti d'un droit d'usage sur le mobilier du logement, à condition d'en faire la demande dans l'année qui suit le décès et de ne pas avoir été privé de ce droit par un testament authentique du défunt. La valeur fiscale de ces droits viagers est fixée à 60 % de celle de l'usufruit (CGI art. 762 bis), en prenant en compte l'âge du conjoint au moment où le droit viager débute, c'est-à-dire un an après le décès. Par exemple, pour un appartement constituant un bien propre du défunt d'une valeur de 400 000 € et à supposer que la veuve ait eu 60 ans dans l'année suivant le décès de son mari, la valeur fiscale du droit d'habitation sera de 120 000 €, soit 60 % de (400 000 € × 50 %).
Cette évaluation n'a en pratique d'incidence que dans un cas : lorsque la valeur ainsi fixée excède celle des droits successoraux du conjoint. Car alors, les droits de succession dus par les autres héritiers sont calculés sur la part qu'ils recueillent effectivement, c'est-à-dire déduction faite des droits viagers du conjoint.
La déclaration de succession doit être souscrite dans les six mois du décès, alors que le conjoint a un an pour faire savoir s'il entend bénéficier de ses droits viagers. Il peut donc arriver que le conjoint n'ait pas encore pris parti au moment du dépôt de la déclaration. Dans ce cas, l'administration calcule les droits dus par les autres héritiers comme si le conjoint n'entendait pas se prévaloir de ses droits viagers. Si le conjoint demande ensuite à en bénéficier, il faudra déposer une déclaration de succession complémentaire dans les six mois de cette décision. Sur réclamation, l'excédent de droits sera remboursé aux héritiers.
Le fait que le logement soit grevé des droits d'habitation et d'usage du conjoint permet aux héritiers « nus-propriétaires » de demander à bénéficier du paiement différé des droits de succession.
En cas de conversion ultérieure en rente viagère ou en capital des droits d'habitation et d'usage, le calcul des droits de succession n'est pas remis en cause (BOI-ENR-DMTG-10-50-10 no 180). Aucune nouvelle déclaration de succession n'est à souscrire. Si le paiement différé des droits avait été demandé, il prend fin à l'expiration d'un délai de six mois à compter de la conversion (BOI-ENR-DG-50-20-20 no 135). Quant à l'opération de conversion elle-même, elle est taxable au droit fixe de 125 €.
L'héritier qui reçoit un bien en usufruit ou en nue-propriété doit évaluer son usufruit ou sa nue-propriété d'après le barème de l'article 669 du Code général des impôts. Ce barème fixe la valeur imposable de l'usufruit viager (usufruit prenant fin au décès de l'usufruitier) et de la nue-propriété correspondante à une fraction de la valeur de la pleine propriété d'après l'âge de l'usufruitier au décès. Si l'usufruit est à durée fixe, il est évalué à 23 % de la valeur de la pleine propriété par période de dix ans mais sa valeur ne peut pas excéder celle de l'usufruit viager.
Ce sont les meubles proprement dits, c'est-à-dire le mobilier destiné à l'usage et à la décoration des appartements : lits, sièges, tables, tapisseries, glaces, pendules, statues, tableaux, etc.
La valeur imposable des meubles meublants résulte de la déclaration détaillée et estimative des héritiers, qui ne peut sauf preuve contraire être inférieure à 5 % de l'ensemble des autres biens du défunt. Ce forfait mobilier de 5 % se calcule sur l'ensemble des biens, autres que les meubles meublants, composant l'actif successoral avant déduction du passif.
Les héritiers peuvent échapper au forfait de 5 % en prouvant que le défunt n'avait pas de meubles, parce qu'il était par exemple en maison de retraite, n'y disposait pas de meubles personnels et n'avait pas d'autre habitation meublée (par exemple, CA Paris 27-9-2011 no 10/14851 : RJF 2/12 no 177). De son côté, l'administration peut écarter le forfait de 5 % en établissant que la valeur réelle des meubles meublants est supérieure à 5 %.
Cependant, dans deux cas, c'est une autre valeur qui doit être retenue, à savoir, par ordre de préférence :
- le prix net obtenu par vente publique dans les deux ans du décès ;
- à défaut, l'estimation contenue dans un inventaire établi par un notaire, un commissaire-priseur judiciaire ou un huissier, dans les cinq années suivant le décès. Bien que l'administration soit d'un avis contraire (BOI-ENR-DMTG-10-40-10-20 no 60), un inventaire limité aux seuls meubles meublants du défunt (à l'exclusion de ses autres biens meubles : titres, espèces, bijoux, etc.) est probant et permet par conséquent d'échapper au forfait de 5 % (Cass. com. 30-11-2004 no 02-12.183 : RJF 4/05 no 404).
Ce prix de vente ou cette valeur d'inventaire se substitueront, s'il y a lieu, à la valeur déclarée.
Lorsque la succession comporte de nombreux biens autres que des meubles meublants, l'application du forfait de 5 % peut conduire à surévaluer artificiellement les meubles meublants. Si tel est le cas, il peut être conseillé d'établir un inventaire pour échapper au forfait.
La valeur imposable de ces objets résulte normalement de la déclaration détaillée et estimative des héritiers (sans aucun minimum forfaitaire). Mais s'il existe un contrat d'assurance contre le vol ou l'incendie, en cours au jour du décès et conclu moins de dix ans avant l'ouverture de la succession par le défunt (ou son conjoint ou encore ceux dont il était héritier ou légataire universel ou à titre universel), l'évaluation ne peut pas être inférieure à la valeur mentionnée dans le contrat.
Ici encore, la valeur déclarée doit être remplacée, le cas échéant (CGI art. 764, I et II) :
- par le prix net d'une vente publique intervenue dans les deux ans du décès ;
- à défaut et en l'absence de contrat d'assurance, par l'évaluation contenue dans un acte estimatif dressé dans les cinq ans du décès (inventaire, délivrance de legs, partage, etc.).
Il s'agit des meubles dotés d'une consistance physique et autres que les meubles meublants et les bijoux, pierreries, etc., dont on vient de voir les règles spécifiques d'évaluation.
Ces biens font l'objet d'une déclaration estimative, sans forfait minimal ni minimum d'évaluation en fonction des contrats d'assurance.
La valeur déclarée est remplacée, le cas échéant :
- par le prix net d'une vente publique intervenue dans les deux ans du décès ;
- à défaut, par l'évaluation contenue dans un acte estimatif dressé dans les cinq ans du décès : inventaire, délivrance de legs, acte de partage, etc.
Ces règles d'évaluation concernent les biens tels que le linge de maison, la vaisselle, les vêtements, etc. Elles s'appliquent aussi aux voitures, dont l'estimation correspond normalement à la valeur de reprise, inférieure de 10 à 15 % à la valeur de l'Argus pour les véhicules en bon état d'entretien.
Les lingots et pièces d'or sont évalués par référence aux cours publiés à titre indicatif par CPoR Devises (opérateur qui fixe les cours et assure la liquidité des pièces et lingots) ou par la Banque de France, en retenant le cours le plus proche de la date du décès.
Les valeurs mobilières cotées (françaises ou étrangères) sont évaluées, au choix des héritiers ou légataires (CGI art. 759) :
- soit d'après le cours moyen de la bourse au jour du décès : moyenne du cours le plus haut et du cours le plus bas ou cours unique s'il n'y a eu qu'un cours. S'il n'y a pas eu de cotation le jour du décès, c'est le cours le plus proche qui est retenu ;
- soit d'après la moyenne des 30 derniers cours qui précèdent le décès.
Les titres non cotés sont évalués à leur valeur réelle de marché, selon la déclaration détaillée et estimative des successeurs. La valeur vénale doit en principe être déterminée selon la méthode par comparaison. Si le défunt dirigeait une société non cotée (gérant de SARL ou de société en nom collectif, par exemple), son décès est un élément à prendre en compte pour évaluer les titres qu'il détenait (CGI art. 764 A).
Les créances à terme sont évaluées pour leur montant nominal augmenté des intérêts courus à la date du décès et des intérêts échus qui n'auraient pas encore été payés (CGI art. 760, al. 1). Cette règle s'applique notamment aux prêts non encore parvenus à échéance, aux bons et contrats de capitalisation, ainsi qu'aux liquidités : livret de développement durable, livret de caisse d'épargne, comptes rémunérés, etc.
Par exception, si le débiteur est en procédure de sauvegarde, redressement ou liquidation judiciaire, les créances à terme peuvent être déclarées pour leur valeur vénale réelle, c'est-à-dire pour leur valeur probable de recouvrement (CGI art. 760, al. 2).
Les créances dont le montant n'est pas déterminé doivent faire l'objet d'une déclaration estimative. Les droits sont le cas échéant révisés lorsque le montant exact de la créance est connu (BOI-ENR-DMTG-10-40-10-40 no 60).
- Une créance déjà échue au décès n'est plus une créance à terme. Elle ne doit donc pas être déclarée pour son montant nominal majoré des intérêts courus ou échus au décès, mais pour sa valeur vénale, c'est-à-dire pour sa valeur probable de recouvrement.
- Les dispositions imposant de déclarer dans les six mois les sommes supplémentaires perçues lorsqu'une créance est recouvrée pour un montant supérieur à celui porté dans la déclaration (CGI art. 760, al. 3) ont été jugées inconstitutionnelles (Cons. const. 15-1-2015 no 2014-436 QPC : RJF 4/15 no 348).
Ce sont celles qui étaient à la charge personnelle du défunt au jour de son décès (CGI art. 768), ce qui exclut en principe toutes celles qui prennent naissance plus tard : frais de clôture des comptes bancaires du défunt, frais de délivrance d'un legs, honoraires d'un généalogiste, etc.
Pour être déductible, il n'est pas nécessaire que la dette soit exigible, il suffit qu'elle soit certaine dans son principe. Un devis de travaux qui a été accepté sans condition par le défunt est par exemple déductible (Cass. com. 2-12-1986 no 84-17.833 : RJF 2/87 no 256). Si son montant n'est pas encore connu à la date du dépôt de la déclaration de succession, la dette est portée pour mémoire dans la déclaration ; elle sera déduite, sur réclamation, lorsque son montant sera arrêté.
Les dettes dont l'existence est incertaine à la date du décès ne sont pas déductibles. Tel est le cas par exemple des dettes litigieuses (notamment les redressements fiscaux contestés) ; mais en cas de reconnaissance judiciaire postérieure, l'impôt perçu en trop sera restituable sur réclamation.
Les dettes contractées pour l'achat de biens exonérés, ou dans l'intérêt de tels biens, sont imputées par priorité sur la valeur de ces biens (CGI art. 769, al. 1), ce qui les élimine, en tout ou partie, du passif déductible de l'actif successoral. S'il s'agit de biens partiellement exonérés, les bois et forêts par exemple, la dette est déductible de l'actif imposable dans la même proportion que la valeur soumise à l'impôt.
- les frais de dernière maladie (pour la partie non remboursée) ;
- les frais funéraires, pour un montant forfaitairement fixé à 1 500 € (CGI art. 775). Aucun justificatif n'est nécessaire ;
- les frais d'ouverture du testament du défunt ;
- la rémunération du mandataire à effet posthume, à condition qu'elle soit déterminée de manière définitive dans les six mois suivant le décès et dans la double limite de 0,5 % de l'actif successoral et de 10 000 € (CGI art. 775 quinquies) ;
- les impôts dus par le défunt, même mis en recouvrement après le décès (mais pas les droits de succession eux-mêmes, qui sont une dette des successeurs) ;
- les emprunts non couverts par une assurance décès, pour un montant égal au capital restant dû augmenté des intérêts échus qui n'auraient pas encore été payés et des intérêts courus à la date du décès ;
- les factures d'électricité, de gaz et de téléphone non encore réglées au jour du décès ;
- les frais de copropriété, y compris les travaux votés et non payés ;
- les dépôts de garantie restituables pour des immeubles donnés en location ;
- les indemnités de préavis et de licenciement dues aux employés de maison licenciés du fait du décès (BOI-ENR-DMTG-10-40-20-10 no 20) ;
- le montant des loyers ou de l'indemnité d'occupation que la succession doit rembourser au conjoint ou au partenaire de Pacs survivant au titre de sa résidence principale pendant l'année qui suit le décès (logement loué ou appartenant en indivision au défunt) ;
- les frais de reconstitution des titres de propriété d'immeubles pour lesquels le droit de propriété du défunt n'a pas été régulièrement constaté antérieurement à son décès, à condition que les attestations immobilières notariées relatives à ces biens soient publiées dans les 24 mois du décès (CGI art. 775 sexies ; BOI-ENR-DMTG-10-40-20-10 nos 142 à 147). A ce titre, les dépenses de généalogiste sont déductibles.
En plus de celles qui n'étaient pas à la charge personnelle du défunt au jour de son décès, sont non déductibles les dettes suivantes (liste non exhaustive) (CGI art. 773) :
- celles qui étaient échues depuis plus de trois mois lors de l'ouverture de la succession. Ces dettes sont présumées remboursées, sachant que la preuve contraire peut être apportée par une attestation du créancier ;
- celles qui ont été consenties au profit d'héritiers ou de légataires universels ou de personnes réputées interposées (conjoint, descendants et les deux parents des héritiers ou légataires universels). Ces dettes sont présumées fictives et la preuve contraire ne peut être apportée que par un acte authentique (acte notarié en général) ou par un acte sous seing privé enregistré avant le décès. Une reconnaissance de dette signée de l'emprunteur défunt mais non enregistrée serait par exemple irrecevable. En revanche, les dettes d'origine légale liant le défunt à ses héritiers sont déductibles dans les conditions de droit commun, telle la dette de restitution à laquelle est tenu le quasi-usufruitier d'une somme d'argent (Cass. com. 27-5-2015 no 14-16.246 : RJF 8-9/15 no 737) ;
- celles qui ont été reconnues par testament.
Les dettes dont la déduction est demandée doivent être prouvées et détaillées dans un inventaire à joindre à la déclaration de succession (CGI art. 770, al. 1). Cet inventaire peut être inséré dans le corps de la déclaration (BOI-ENR-DMTG-10-40-20-30 no 10).
Pour les dettes résultant d'un acte notarié, les héritiers doivent indiquer la date de l'acte, le nom et la résidence du notaire qui l'a reçu.
Pour les autres dettes, les héritiers doivent présenter les titres, actes ou écrits, sachant que le créancier ne peut, sous peine de dommages-intérêts, se refuser à les communiquer.
Dans tous les cas, l'administration peut exiger du créancier une attestation certifiant l'existence de la dette au jour du décès (LPF art. L 20). En pratique, c'est en général le notaire qui se charge d'obtenir les attestations des créanciers.
Les droits de succession sont calculés sur la part revenant à chaque héritier ou légataire non exonéré après déduction du passif. Cette part nette est déterminée en faisant application des règles de la dévolution successorale que l'on a vues au début de ce Dossier et en tenant compte, s'il en existe, des dispositions testamentaires du défunt ainsi que des donations déjà reçues par les héritiers ou légataires.
La part nette ainsi déterminée est ensuite diminuée d'un ou plusieurs abattements. On obtient alors la base de calcul de l'impôt, sur laquelle sont appliqués les tarifs des droits de succession dont le taux varie en fonction du lien de parenté entre le défunt et ses successibles. Le cas échéant, le montant de l'impôt obtenu est diminué d'une réduction de droits.
La liquidation de la succession prend en compte les donations qui ont pu être consenties par le défunt à ses futurs héritiers et légataires. Cette prise en compte s'opère de deux façons différentes et qu'il ne faut pas confondre.
On a déjà indiqué que certaines donations effectuées au profit des héritiers devaient être rapportées à la succession. Ce mécanisme du rapport civil, qui sert uniquement à déterminer ce que prendra chaque héritier dans le partage, n'a pas d'incidence fiscale directe. Les donations qui sont rapportées par leur bénéficiaire ont normalement déjà été taxées et il n'y a pas lieu de les imposer une seconde fois : elles sont donc déduites de la part taxable de l'héritier qui effectue le rapport (voir exemple au no 30103).
Tout autre est le mécanisme du rappel fiscal, dont l'objet est le calcul de l'impôt. Le rappel fiscal est destiné à relier entre elles les taxations effectuées sur les donations antérieures et celle qui résulte de la succession, au regard des abattements et du tarif progressif des droits ainsi que des réductions de droits. Il vise toutes les donations, notariées ou non, rapportables ou non, à l'exception :
- des dons familiaux de sommes d'argent mentionnés no 30892 ;
- et des donations qui ont été consenties et présentées à la formalité de l'enregistrement depuis plus de 15 ans à la date du décès. Le délai de 15 ans s'applique aux successions ouvertes depuis le 17 août 2012 ; il était auparavant de 10 ans.
Le rappel fiscal des donations antérieures entraîne les effets suivants sur le calcul des droits (CGI art. 784) :
- les abattements personnels ne sont appliqués que déduction faite de ceux dont l'intéressé a déjà bénéficié sur la donation antérieure ;
- si un tarif progressif est applicable (succession en ligne directe, notamment), les tranches d'impôt les plus basses déjà utilisées ne peuvent plus l'être ;
- les réductions de droits pour charges de famille ne sont applicables que déduction faite des réductions déjà accordées.
Le rappel fiscal des donations antérieures a également un effet sur le délai de reprise de l'administration fiscale, c'est-à-dire sur le délai dont dispose le fisc pour effectuer un redressement : la valeur des biens ayant fait l'objet de la donation antérieure pourra être rectifiée lors de son rappel fiscal, soit bien au-delà du délai de trois ans normalement applicable aux insuffisances d'évaluation.
Monsieur Dupont, alors âgé de 83 ans, a consenti à son fils unique le 1er juin 2008 la donation d'un immeuble valant 500 000 €.
Lors de l'enregistrement de l'acte de donation, les droits ont été calculés ainsi :
- donation |
500 000 € |
- abattement applicable en 2008 |
- 151 950 € |
- part taxable |
348 050 € |
Tarif applicable en 2008 |
|
- 5 % sur 7 699 € |
384,95 € |
- 10 % sur 3 849 € |
+ 384,90 € |
- 15 % sur 3 647 € |
+ 547,05 € |
- 20 % sur 332 855 € |
+ 66 571,00 € |
Total |
67 888 € |
Monsieur Dupont est décédé en mai 2015. |
|
L'actif net de sa succession s'élève à 800 000 €, revenant en totalité à son fils. |
|
- actif net successoral |
800 000 € |
- abattement disponible (100 000 € - 151 950 € déjà utilisés en 2008) |
- 0 € |
- part taxable |
800 000 € |
Tarif applicable au jour du décès |
|
- 5 % sur 373 € (soit 8 072 € - 7 699 €) |
18,65 € |
- 10 % sur 188 € (soit 4 037 € - 3 849 €) |
+ 18,80 € |
- 15 % sur 176 € (soit 3 823 € - 3 647 €) |
+ 26,40 € |
- 20 % sur 203 537 € (soit 536 392 € - 332 855 €) |
+ 40 707,40 € |
- 30 % sur 350 514 € (soit 902 838 € - 552 324 €) |
+ 105 154,20 € |
- 40 % sur 245 212 € (soit 800 000 € - 554 788 €) |
+ 98 084,80 € |
Total |
= 244 010 € |
La part nette qui revient à chaque héritier ou légataire non exonéré est diminuée d'un abattement, dont le montant varie selon la qualité du bénéficiaire. Tous les abattements sont personnels : si la part d'un héritier est insuffisante pour lui permettre d'en bénéficier intégralement, l'excédent n'est pas reporté sur la part des autres.
Les montants des abattements sont les suivants (CGI art. 779) :
- 100 000 € pour les enfants (montant applicable aux successions ouvertes depuis le 17 août 2012). Pour le cas particulier des enfants ayant fait l'objet d'une adoption simple : voir no 30782. Les petits-enfants ne bénéficient pas de cet abattement, mais seulement de celui de 1 594 €, sauf s'ils héritent parce que leur père ou mère est déjà décédé ou renonce à la succession. Exemple : un père décède le 25 mai 2051, laissant deux fils ; l'un d'entre eux renonce à la succession, ses trois enfants l'acceptant à sa place par représentation. Les trois petits-enfants se partageront l'abattement de 100 000 € auquel leur père aurait eu droit s'il avait accepté la succession (soit un abattement de 33 333 € chacun). En cas de prédécès ou de renonciation à la succession d'un enfant unique, et bien que les petits-enfants héritent dans ce cas de leur propre chef et non par représentation, l'administration les fait pareillement bénéficier de l'abattement auquel aurait eu droit leur père ou mère (BOI-ENR-DMTG-10-50-20 no 50) ;
- 100 000 € pour les ascendants : parents, grands-parents, le cas échéant arrière-grands-parents (montant applicable aux successions ouvertes depuis le 17 août 2012) ;
- 15 932 € pour les frères et soeurs (lorsqu'ils ne sont pas exonérés : voir no 30576) ;
- 7 967 € pour les neveux ou nièces (entendus au sens strict des enfants des frères et soeurs du défunt, à l'exclusion des neveux et nièces par alliance). Mais c'est l'abattement de 15 932 € des frères et soeurs, et non celui de 7 967 €, qui s'applique aux neveux et nièces qui représentent leur père ou mère décédé ou renonçant à la succession, règle qui est en pratique défavorable s'il y a plus de deux enfants (15 932 € / 2 = 7 966,50 €). Par exemple, les trois neveux qui héritent de leur oncle par représentation de leur père déjà décédé n'auront droit chacun qu'à 5 311 € d'abattement (un tiers de 15 932 €). Si l'un de ces neveux est également bénéficiaire d'un legs, il y aura un double calcul des droits de succession, puisque les droits dus sur la fraction des biens légués seront calculés après l'abattement de 7 967 € applicable aux neveux et nièces. Si un neveu (ou une nièce) hérite non par représentation mais de son propre chef, parce que son père (ou sa mère) prédécédé(e) ou renonçant(e) était l'unique frère (soeur) du défunt, l'administration fiscale lui refuse l'abattement (de même et surtout le tarif) applicable entre frères et soeurs (contrairement à la solution qu'elle admet en ligne directe) (BOI-ENR-DMTG-20-30-20-10 no 40). Ce neveu (ou cette nièce) n'aura donc droit qu'à un abattement de 7 967 € ;
- 1 594 € sur chaque part successorale, à défaut d'autre abattement, quel que soit le lien de parenté avec le défunt, et même en l'absence de lien de parenté.
Les handicapés physiques et mentaux ont droit à un abattement spécifique dont le montant s'élève à 159 325 € (CGI art. 779, II). Cet abattement s'applique sans condition de parenté avec le défunt et s'ajoute, le cas échéant, à celui dont l'héritier ou le légataire handicapé peut bénéficier en qualité d'enfant, de frère, etc.
Pour bénéficier de l'abattement, l'héritier ou légataire doit être atteint, à la date de la transmission, d'une infirmité physique ou mentale, congénitale ou acquise, l'empêchant de se livrer, dans des conditions normales de rentabilité, à toute activité professionnelle ou, s'il a moins de 18 ans, d'acquérir une instruction ou une formation professionnelle d'un niveau normal. En pratique, la plupart des tribunaux interprètent souplement les conditions d'octroi de l'abattement.
Pour justifier de son état, la personne handicapée peut avoir recours à tous les éléments de preuve, par exemple une décision de classement dans la catégorie des handicapés graves par la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées ou même la production d'un certificat médical circonstancié.
Chaque héritier ou légataire peut, sous certaines conditions, déduire de la part nette qu'il reçoit le montant des dons qu'il consent grâce à son héritage à certaines fondations ou associations reconnues d'utilité publique, de même qu'à l'Etat, aux collectivités territoriales ou à leurs établissements publics (CGI art. 788, III).
Les conditions de la déduction sont les suivantes : les dons doivent être faits dans les six mois du décès, porter sur des sommes d'argent (à l'exception de ceux au profit des fondations reconnues d'utilité publique, qui peuvent être effectués en nature) et être consentis en pleine propriété. Ils doivent en outre être justifiés au moyen d'une attestation jointe à la déclaration de succession.
La déduction pour don est cumulable avec les autres abattements existant en matière de droits de succession. Elle ne l'est pas, en revanche, avec la réduction d'impôt sur le revenu à laquelle les dons peuvent ouvrir droit, ni avec la réduction d'ISF prévue pour certains dons en numéraire. L'héritier ou légataire doit donc faire une simulation pour déterminer l'option la plus avantageuse. En pratique, c'est rarement l'abattement sur l'actif successoral.
Sont visées ici toutes les transmissions en ligne directe, c'est-à-dire aussi bien aux enfants, petits-enfants et arrière-petits-enfants qu'aux parents, grands-parents et arrière-grands-parents. Ces transmissions bénéficient d'un tarif progressif par tranches.
Les enfants qui ont fait l'objet d'une adoption plénière sont traités comme des enfants par le sang.
Les enfants qui ont fait l'objet d'une adoption simple bénéficient de l'abattement et des tarifs en ligne directe à l'égard de leurs parents biologiques, mais sont en principe traités comme des étrangers (abattement minime de 1 594 € et taux d'imposition de 60 %) à l'égard de leurs parents adoptifs. Il y a toutefois des exceptions à ce principe. C'est le cas notamment pour les transmissions faites en faveur (CGI art. 786) :
- des enfants issus d'un premier mariage du conjoint de l'adoptant (ou adoptés par adoption plénière par le conjoint de l'adoptant) ;
- ou en faveur d'adoptés qui, soit dans leur minorité et pendant cinq ans au moins, soit dans leur minorité et leur majorité et pendant dix ans au moins, ont reçu de l'adoptant des secours et des soins ininterrompus. Cette condition n'implique pas une prise en charge exclusive, mais seulement continue et principale, de l'adopté par l'adoptant (Cass. com. 6-5-2014 no 12-21.835 : RJF 8-9/14 no 851 ; BOI-ENR-DMTG-10-50-80 no 80).
Dans ces deux cas, l'adopté a droit au régime fiscal des transmissions en ligne directe.
Tarif des droits en ligne directe (CGI art. 777, tableau I) |
||
---|---|---|
Taux par tranche de part taxable |
Part taxable après abattement (P) |
Montant cumulé des droits |
5 % |
N'excédant pas 8 072 € |
P × 0,05 |
10 % |
Entre 8 072 € et 12 109 € |
(P × 0,1) - 404 € |
15 % |
Entre 12 109 € et 15 932 € |
(P × 0,15) - 1 009 € |
20 % |
Entre 15 932 € et 552 324 € |
(P × 0,2) - 1 806 € |
30 % |
Entre 552 324 € et 902 838 € |
(P × 0,3) - 57 038 € |
40 % |
Entre 902 838 € et 1 805 677 € |
(P × 0,4) - 147 322 € |
45 % |
Au-delà de 1 805 677 € |
(P × 0,45) - 237 606 € |
Exemple : pour un héritage de 600 000 € reçu en mai 2015 par un enfant, on a après abattement une part nette taxable de 500 000 €. Les droits dus avant éventuelle réduction d'impôt s'élèvent à (500 000 € × 0,2) - 1 806 € = 98 194 € (ce qui correspond à une taxation à 5 % sur les 8 072 premiers euros, 10 % sur 4 037 €, 15 % sur 3 823 € et 20 % sur les 484 068 euros suivants).
Le tarif des droits entre frères et soeurs est le suivant (CGI art. 777, tableau III) :
- 35 % jusqu'à 24 430 € ;
- 45 % au-delà de 24 430 €.
Le tarif applicable aux frères et soeurs concerne également, lorsqu'ils ne sont pas exonérés, les établissements publics, les associations reconnues d'utilité publique et les fondations reconnues d'utilité publique (CGI art. 777, avant-dernier alinéa).
Entre parents jusqu'au 4e degré inclusivement (entre oncle et neveu ou entre cousins germains), un taux unique d'imposition de 55 % est applicable. S'agissant des successions dévolues aux neveux et nièces, c'est le tarif des frères et soeurs qui s'applique lorsque les neveux et nièces héritent de leur oncle ou tante par représentation de leur père ou mère déjà décédé ou ayant renoncé à la succession (les règles sont les mêmes que pour l'abattement : voir no 30750).
Enfin, entre parents au-delà du 4e degré ainsi qu'entre non-parents, par exemple entre concubins non pacsés, les transmissions sont uniformément taxées à 60 %.
En cas d'achat d'un bien en commun, les acquéreurs peuvent prévoir dans l'acte qu'au décès de chacun d'entre eux sa part reviendra aux survivants, de sorte que le dernier survivant sera réputé propriétaire de la totalité du bien depuis son acquisition. Cette clause est dite d'accroissement, de condition de survie ou de tontine. Les transferts de propriété qui en résultent sont - pour les contrats conclus depuis le 6 septembre 1979 - soumis aux droits de succession selon le régime de droit commun, c'est-à-dire d'après le lien de parenté existant entre le défunt et le ou les bénéficiaires de la tontine et sur la valeur de la part reçue par chacun d'eux (CGI art. 754 A).
Une seule exception résiduelle est prévue, pour les immeubles affectés à l'habitation principale commune à deux acquéreurs. Si l'immeuble vaut moins de 76 000 € au moment du premier décès, la part transmise au survivant est passible des seuls droits de vente d'immeubles (soit une taxation d'environ 5 %), sauf option du survivant pour les droits de succession.
En pratique, le régime fiscal de la tontine n'est favorable que lorsque les tontiniers sont exonérés de droits de succession. L'acquisition en tontine peut notamment intéresser les partenaires de Pacs : le bien acquis en tontine échappe aux héritiers du partenaire prédécédé et revient en franchise d'impôt au survivant.
Lorsque les tontiniers ne sont pas exonérés (cas notamment des concubins non pacsés), la taxation aux droits de succession est particulièrement pénalisante. Mais il est possible d'y échapper, en insérant la clause de tontine non dans l'acte d'acquisition du bien mais dans les statuts d'une société, laquelle achète le bien (en ce sens, BOI-ENR-DMTG-10-10-10-10 no 280). Dans ce cas, ce sont les droits de vente qui seront dus sur les parts de la société au décès de chaque associé, et non les droits de succession.
Si l'héritier ou légataire (ou donataire) a trois enfants ou plus, vivants ou représentés (ou décédés après leur 16e anniversaire) à l'ouverture de la succession, il bénéficie sur les droits à sa charge d'une réduction égale à (CGI art. 780) :
- 610 € par enfant à partir du troisième, si la transmission s'opère en ligne directe (succession ou donation) ou entre époux ou partenaires de Pacs (donation entre vifs) ;
- 305 € par enfant à partir du troisième, si la transmission par succession ou donation s'opère en ligne collatérale ou entre personnes non parentes.
La réduction de droits est accordée au vu d'une photocopie du livret de famille de l'héritier.
Par exemple, le neveu qui hérite de son oncle bénéficie d'une réduction de droits de 305 € s'il est père de trois enfants et de 610 € s'il a quatre enfants. Quand un fils hérite de son père, la réduction de droits est de 610 € s'il a trois enfants, de 1 220 € s'il en a quatre.
Les droits dus par les mutilés de guerre frappés d'une invalidité de 50 % au minimum bénéficient d'une réduction de moitié, plafonnée à 305 €.
Les droits de succession sont payés par les héritiers et/ou légataires du défunt.
A l'exception de ceux qui sont exonérés de droits de succession, les héritiers sont solidaires pour le paiement des droits et des éventuelles pénalités (CGI art. 1709). L'administration fiscale peut donc réclamer la totalité de l'impôt à l'héritier de son choix. Mais si l'administration peut choisir de notifier les redressements à l'un seulement des héritiers, la procédure ensuite suivie doit être contradictoire et la loyauté des débats l'oblige à notifier les actes de celle-ci à tous les autres cohéritiers solidaires (Cass. com. 26-2-2013 no 12-13.877 : RJF 6/13 no 669 ; Cass. com. 25-3-2014 no 12-27.612 : RJF 6/14 no 634).
Les légataires, qui reçoivent les biens en vertu du testament du défunt, ne sont pas solidairement tenus du paiement des droits de succession, ni entre eux ni avec les héritiers. Chaque légataire n'est tenu qu'au paiement des droits afférents à son propre legs.
Les droits de succession se paient en principe en numéraire. Mais d'autres moyens de paiement sont possibles (certaines valeurs du Trésor, notamment). Moyennant agrément, et si les droits à payer par l'intéressé atteignent 10 000 €, il est aussi possible d'acquitter les droits de succession par la remise d'oeuvres d'art, de bois et forêts, de certains immeubles situés dans les zones d'intervention du Conservatoire de l'espace littoral et des rivages lacustres, etc. (CGI art. 1716 bis).
En principe, les droits doivent faire l'objet d'un paiement comptant, lors du dépôt de la déclaration.
Mais il est possible d'obtenir des délais de paiement. Deux systèmes sont prévus : le paiement fractionné et le paiement différé. Une formule mixte, plus favorable, s'applique aux transmissions d'entreprises.
Pour bénéficier d'un système de paiement à crédit, il faut le demander, soit dans la déclaration de succession, soit séparément sur une simple lettre jointe à la déclaration. La demande doit contenir une offre de garanties suffisantes pour couvrir l'intégralité du montant à payer : une hypothèque sur un immeuble, une caution personnelle, le nantissement de titres, etc. L'administration a trois mois pour accepter ou refuser la demande, le même délai étant accordé à l'héritier pour constituer des garanties (CGI ann. III art. 400, al. 3).
Qui dit crédit dit intérêts dont le taux est fixé une fois pour toutes au jour de la demande. Ce taux est égal au taux effectif moyen pratiqué par les établissements de crédit au cours du quatrième trimestre de l'année précédant celle de la demande pour les prêts immobiliers à taux fixe consentis aux particuliers, réduit d'un tiers et arrondi à la première décimale (CGI ann. III art. 401 modifié par le décret 2014-1565 du 22-12-2014). Le taux applicable aux demandes de paiement fractionné ou différé effectuées en 2015 est égal à 2,2 %.
Savoir
Les cohéritiers peuvent choisir des régimes de paiement différents : certains peuvent payer comptant, d'autres à crédit. Cependant, du fait de la solidarité des héritiers pour le paiement des droits, le paiement différé ou fractionné ne sera accordé à ceux qui demandent un crédit qu'avec l'accord de ceux qui veulent payer comptant, ces derniers devant en outre reconnaître qu'ils ne sont pas libérés par leur propre paiement et qu'ils restent tenus des sommes qui font l'objet du crédit (BOI-ENR-DG-50-20-30 no 280).
Il consiste à payer les droits de succession en plusieurs versements égaux et à intervalles de six mois au plus, sur une période maximale de un an en principe. Le premier versement est effectué avec le dépôt de la déclaration de succession.
Le nombre de versements est limité à trois (CGI ann. III art. 404 A, I-al. 3 tel que modifié par le décret 2014-1565 du 22-12-2014 applicable aux demandes de crédit de paiement fractionné formulées depuis le 1-1-2015).
Le délai est porté de un à trois ans et le nombre de versements est égal à sept si la succession recueillie est composée, pour moitié au moins, de biens non liquides dont la liste est la suivante : immeubles, parts de sociétés de personnes (telles les sociétés civiles ou les sociétés en nom collectif), valeurs mobilières non cotées, brevets, objets d'antiquité, d'art ou de collection, clientèles, créances non encore exigibles au décès, droits d'auteur, fonds de commerce (y compris le matériel et les marchandises), matériels agricoles, bestiaux et récoltes, offices ministériels.
Le coût fiscal d'une succession comprend le droit de partage, qui vient s'ajouter aux droits de succession lorsque le défunt laisse plusieurs héritiers ou légataires. Il faut noter que les héritiers qui sont exonérés de droits de succession ne le sont pas du droit de partage. Il en résulte notamment qu'il n'y a pas lieu de déduire de l'assiette du droit de partage la part de succession revenant au conjoint survivant.
Le droit de partage est dû au moment où est établi l'acte qui constate le partage de la succession.
Le taux du droit de partage est de 2,5 %. Il est calculé sur la valeur nette de l'actif partagé. Si cette valeur n'est pas déterminée dans l'acte qui constate le partage, il faut fournir une déclaration estimative détaillée.
Ces règles s'appliquent en principe, y compris aux partages avec soulte (l'un des héritiers reçoit plus que sa part, mais rétablit l'équilibre en versant une compensation financière à celui ou ceux qui ont moins reçu) ou avec plus-value (l'inégalité des lots n'est pas compensée) (CGI art. 748). Par exception, si le partage n'est pas réalisé entre les membres originaires de l'indivision, leur conjoint, leurs ascendants, leurs descendants ou leurs ayants droit à titre universel (héritiers ou légataires universels), le droit de partage est dû sur l'actif net partagé déduction faite du passif et des soultes ou plus-values, ces dernières étant taxées au droit de vente.
Le même régime s'applique aux partages de communautés conjugales ou d'indivisions entre époux ou entre partenaires de Pacs.
Un régime analogue s'applique aux ventes aux enchères de biens indivis, ou licitations, et aux cessions de droits successifs, contrats par lesquels des héritiers vendent tous leurs droits dans la succession (CGI art. 750).
Le paiement différé peut être demandé par les héritiers et légataires qui reçoivent des biens en nue-propriété, pour le paiement des droits afférents à cette nue-propriété (cas particulier des droits viagers d'habitation et d'usage du conjoint survivant sur sa résidence principale : voir no 30625).
Le paiement des droits peut être différé jusqu'à l'expiration d'un délai de six mois à compter (CGI ann. III art. 404 B) :
- soit de la date de la réunion de l'usufruit à la nue-propriété (qui est le plus souvent celle du décès de l'usufruitier) ;
- soit de la cession totale ou partielle de la nue-propriété. Une réserve toutefois : si le montant de la vente est inférieur aux droits différés, le crédit peut se poursuivre pour le solde si le prix de vente est versé à titre d'acompte sur les droits en suspens (BOI-ENR-DG-50-20-30 no 240). Ajoutons que l'héritier nu-propriétaire d'un portefeuille de valeurs mobilières ne perd pas le bénéfice du paiement différé si l'usufruitier vend des titres, à condition que le prix obtenu soit intégralement réinvesti dans l'achat de nouvelles valeurs mobilières (BOI-ENR-DG-50-20-30 no 260).
Savoir
Le nu-propriétaire qui demande le paiement différé est dispensé du paiement des intérêts s'il accepte que les droits de succession soient calculés, à la date du décès, sur la valeur imposable de la pleine propriété des biens recueillis en nue-propriété (CGI ann. III art. 404 B). Attention toutefois à cette option qui n'est pas sans risque : si l'usufruitier renonce ensuite à ses droits au profit du nu-propriétaire, l'administration peut taxer cette renonciation en tant que donation indirecte. L'usufruit sera donc taxé deux fois : une fois aux droits de succession (en contrepartie de la dispense d'intérêts) et une fois aux droits de donation. Il n'y a pas là double imposition selon la Cour de cassation (Cass. com. 31-10-2006 no 04-10.796 : RJF 2/07 no 233).
En l'absence de demande de contrôle par les héritiers ou légataires, plusieurs délais sont susceptibles de s'appliquer.
L'administration a en principe six ans, c'est-à-dire jusqu'au 31 décembre de la 6e année qui suit le décès, pour rectifier les omissions, insuffisances ou erreurs commises dans l'établissement de l'impôt (LPF art. L 186). Par exemple, pour un décès survenu le 5 janvier 2015, l'action de l'administration sera éteinte le 31 décembre 2021. Ce délai de six ans s'applique notamment si la déclaration n'a pas été souscrite ou si des biens ont été omis dans la déclaration. Une omission partielle relève de ce délai : par exemple, l'indication d'un solde de compte bancaire inférieur au montant réel. Attention, lorsque les héritiers ou légataires n'ont pas déclaré des avoirs à l'étranger (comptes ou contrats d'assurance-vie, par exemple), l'administration a dix ans, au lieu de six, pour taxer ces sommes (LPF art. L 181-0 A). Le délai de six ans est ramené à trois ans (prescription abrégée) lorsque l'exigibilité des droits est suffisamment révélée par la déclaration ou par un autre acte enregistré, l'administration n'ayant pas besoin d'effectuer des recherches ultérieures pour établir l'impôt (LPF art. L 180). Le délai de reprise de l'administration expire alors le 31 décembre de la troisième année qui suit celle de la déclaration (par exemple, le 31 décembre 2018 si la déclaration de succession a été déposée en 2015). En pratique, ce délai abrégé ne s'applique qu'aux redressements pour insuffisance d'évaluation des biens portés dans la déclaration.
Les signataires de la déclaration de succession attributaires d'au moins un tiers de l'actif net transmis peuvent, dans les trois mois de la déclaration de succession, demander à l'administration fiscale d'effectuer le contrôle de cette déclaration dans les douze mois qui suivent (LPF art. L 21 B). Ni l'accord ni l'information des héritiers ou légataires non demandeurs ne sont nécessaires.
La demande doit être effectuée par écrit, le plus simple étant d'utiliser le modèle donné par l'administration (BOI-LETTRE-000109).
Si elle n'a pas engagé de contrôle à l'issue du délai d'un an, l'administration ne peut plus en principe effectuer de redressement. Restent néanmoins possibles, dans le délai de droit commun de trois ou six ans, les redressements concernant :
- les biens ou droits omis dans la déclaration de succession (de même que les donations antérieures qui auraient dû y figurer : règle du rappel fiscal des donations antérieures) ;
- le non-respect d'un engagement ou d'une condition prévus pour bénéficier d'un régime de faveur ;
- les contribuables passibles de la procédure de répression des abus de droit.
Savoir
Sont exclus du dispositif de contrôle sur demande (BOI-CF-PGR-40-20 nos 30 et 40) :
- les héritiers qui n'ont déposé la déclaration de succession qu'après une mise en demeure. Ceux qui ont déposé la déclaration après une simple lettre amiable de demande de dépôt peuvent bénéficier du contrôle sur demande ;
- les héritiers qui n'ont pas payé les droits en même temps qu'ils ont déposé la déclaration (sauf s'ils ont obtenu un paiement fractionné et/ou différé).
L'administration est destinataire de divers documents qui contribuent à l'efficacité de son contrôle (liste non exhaustive) :
- les maires sont tenus de lui adresser tous les trois mois un relevé des actes de décès, au vu duquel elle surveille le dépôt des déclarations de succession ;
- les dépositaires, détenteurs ou débiteurs de titres, sommes ou valeurs dépendant d'une succession qu'ils sauraient ouverte doivent lui adresser la liste de ces titres, sommes ou valeurs, sauf s'ils sont de faible montant (BOI-ENR-DMTG-10-70-10 no 70). Une obligation analogue pèse sur les assureurs, qui ont 15 jours à partir du moment où ils ont connaissance du décès pour signaler à l'administration fiscale les polices d'assurance d'objets précieux souscrites par le défunt (CGI art. 805).
Pour compléter leur information, les agents de l'administration fiscale ont le droit d'obtenir communication, sur place, de documents détenus par certaines personnes ou organismes énumérés par la loi, parmi lesquels figurent les banques, les compagnies d'assurances, les avocats, les notaires, les huissiers, les tribunaux, etc.
L'administration peut adresser aux héritiers et légataires des demandes de renseignements.
Peuvent faire l'objet d'une demande d'éclaircissements ou de justifications les titres, valeurs et créances non énoncés dans la déclaration et qui sont présumés faire partie de la succession en application de l'article 752 du Code général des impôts (no 30559). A défaut de réponse ou si la réponse est jugée insuffisante, l'administration envoie aux héritiers ou légataires une mise en demeure qui leur accorde trois mois pour fournir les justifications requises ou payer l'impôt. Passé ce délai de trois mois, les héritiers ou légataires ne peuvent plus apporter la preuve que les titres, valeurs et créances concernés ne font pas partie de la succession (LPF art. L 19 et LPFR 19-1).
Des justifications peuvent être également demandées au sujet des dettes de la succession, pour lesquelles l'administration peut exiger des héritiers et autres ayants droit une attestation du créancier certifiant l'existence de la dette à l'époque du décès, attestation que le créancier ne peut pas refuser sous peine de dommages-intérêts.
Dans les deux cas, si ses demandes n'ont pas été satisfaites, l'administration peut rectifier la base d'imposition, en mettant en oeuvre la procédure contradictoire (BOI-ENR-DMTG-10-10-40-20 nos 320 s.).
L'administration effectue une rectification (c'est-à-dire un redressement) si, à l'issue de son contrôle, elle estime que des biens ont été omis ou sous-évalués dans la déclaration de succession.
Ces rectifications sont effectuées selon la procédure contradictoire, ainsi appelée parce qu'elle prévoit un dialogue entre l'administration et le particulier. La procédure commence par l'envoi d'une proposition de rectification. Cette proposition est adressée à son destinataire, qui a 30 jours pour dire s'il accepte ou conteste les rectifications envisagées ; l'héritier ou légataire peut demander 30 jours supplémentaires pour répondre.
Si le litige porte sur l'évaluation des biens et si les observations du contribuable ne sont pas acceptées par l'administration, le désaccord peut être porté pour avis devant la commission départementale de conciliation, à l'initiative de l'une ou l'autre des deux parties (LPF art. L 59). L'héritier ou légataire a 30 jours à compter de la réponse de l'administration rejetant ses observations pour saisir la commission (demande à adresser soit à l'administration, soit directement au secrétariat de la commission). L'avis de la commission est notifié à l'héritier ou légataire par l'administration qui l'informe en même temps du chiffre qu'elle retient comme évaluation. Les droits de succession sont ensuite mis en recouvrement sur cette base.
Les insuffisances d'évaluation et les omissions de biens imposables sont sanctionnées par un intérêt de retard de 0,40 % par mois. Toutefois, celui-ci n'est pas applicable lorsque le contribuable de bonne foi a porté dans sa déclaration une « mention expresse » appelant l'attention sur le point litigieux.
En cas de manquement délibéré (mauvaise foi) établi par l'administration, l'intérêt de retard se cumule avec une majoration de 40 %, portée à 80 % s'il y a eu manoeuvres frauduleuses. La majoration est également portée à 80 % en cas d'abus de droit, si l'administration établit que l'héritier ou légataire a été le principal initiateur ou le principal bénéficiaire de l'acte abusif ; dans le cas contraire, la majoration pour abus de droit est de 40 % (CGI art. 1729).
Les insuffisances d'évaluation ne donnent lieu à aucune sanction, pas même l'intérêt de retard, lorsque l'insuffisance n'excède pas 10 % de la base d'imposition après rectification (règle dite de la tolérance du dixième). Mais attention : les insuffisances s'apprécient bien par bien, et non globalement pour l'ensemble de la succession. Exemple : la valeur d'un bien après rectification est fixée à 100 000 € ; il n'y a pas de sanction si le bien a été déclaré pour 90 000 € au moins.
Si vous contestez les pénalités qui vous sont appliquées ou toute autre sanction (taxation d'office, rectification pour omission ou insuffisance), vous pouvez engager un recours dans les conditions ordinaires, c'est-à-dire en commençant par une réclamation auprès des services fiscaux, réclamation préalable à toute action devant les tribunaux.
Sachez cependant que l'administration peut justifier l'imposition que vous contestez par un texte différent de celui auquel elle s'était d'abord référée, ce qui s'appelle une substitution de base légale.
La réclamation doit être formulée dans un délai qui expire en principe le 31 décembre de la 2e année suivant celle (LPF art. R 196-1) :
- du versement des droits de succession contestés. Exemple : les droits payés en octobre 2015 peuvent être contestés jusqu'au 31 décembre 2017 ;
- ou de la réalisation de l'événement qui motive la réclamation, c'est-à-dire des faits ou circonstances de nature à mettre en cause le bien-fondé de l'impôt ; par exemple, une décision juridictionnelle annulant ou déclarant illégale la disposition sur laquelle est fondé l'impôt.
Ce délai général est parfois remplacé par des délais spéciaux. C'est le cas si vous avez fait l'objet d'un redressement : le délai pour réclamer expire d'une manière générale au 31 décembre de la 3e année suivant celle au cours de laquelle est intervenue la proposition de rectification ; il est prolongé de la même durée que le délai de reprise de l'administration si celui-ci fait l'objet d'une prolongation. Il reste possible de réclamer dans le délai général s'il vient à expiration après le délai spécial.
Si vous laissez passer le délai, votre réclamation ne sera plus recevable. Mais vous pouvez espérer que l'administration fera usage de la procédure de dégrèvement d'office, qui lui permet d'accorder le remboursement d'impôts même sur des années prescrites, c'est-à-dire ne pouvant plus faire l'objet d'un recours.
Vous pouvez aussi, si vous avez des raisons particulières de le faire, demander à l'administration le dégrèvement total ou partiel des pénalités sans en discuter le bien-fondé. Cette demande entre dans la catégorie des recours gracieux ; son issue dépend du bon vouloir de l'administration, dont la décision, si elle est négative, peut toutefois être contestée devant les tribunaux par la voie du recours pour excès de pouvoir.
La plupart des biens exonérés de droits de succession le sont également de droits de donation. En revanche, les exonérations personnelles de droits de succession (conjoint, partenaire de Pacs et sous certaines conditions frères et soeurs) ne s'appliquent pas aux donations.
Pour les exonérations communes (biens ruraux ou entreprises, par exemple), les conditions tenant au défunt sont requises du donateur et celles tenant aux héritiers et légataires du donataire. Les actes de donation doivent comporter les mêmes mentions et être accompagnés des mêmes documents que les déclarations de succession.
Il existe des exonérations spécifiques aux droits de donation, qui concernent :
- certains dons familiaux de sommes d'argent : voir ci-après no 30892 ;
- les donations de terrains à bâtir et de logements neufs : voir ci-après nos 30893 et 30894 ;
- les dons à certains organismes de sommes d'argent ou de titres, qui ouvrent droit à une réduction d'ISF.
A concurrence de 31 865 €, les donations de sommes d'argent au profit de descendants (enfants et petits-enfants, voire arrière-petits-enfants) ou, pour les personnes sans descendance, au profit des neveux et nièces sont exonérées de droits de donation à la double condition (CGI art. 790 G) :
- que le donateur ait moins de 80 ans ;
- et que le bénéficiaire de la donation soit majeur (ou émancipé).
Le don doit être déclaré ou enregistré dans le mois de sa réalisation (formalités spécifiques aux dons manuels, voir no 29507). A cette condition, le don sera dispensé du rappel fiscal, ce qui assure son exonération définitive (CGI art. 790 G, III).
L'exonération est cumulable avec les abattements dont le don peut bénéficier par ailleurs. Une mère peut par exemple donner à sa fille en mai 2015 à la fois 31 865 € (somme d'argent) et 100 000 € (somme d'argent et/ou biens divers), soit 131 865 €. L'exonération est renouvelable tous les 15 ans.
Savoir
Les dons aux neveux et nièces exonérés sont les dons aux enfants des frères et soeurs du donateur, à l'exclusion des dons aux neveux et nièces par alliance (enfants des frères et soeurs du conjoint du donateur).
Les petits-neveux et petites-nièces peuvent être exonérés, mais uniquement si leur père (ou mère), qui était le neveu (ou la nièce) du donateur, est décédé(e) et n'était pas enfant unique.
Si le don est fait à plusieurs petits-neveux ou petites-nièces issus d'un même neveu ou nièce décédé, le plafond d'exonération de 31 865 € est divisé entre les bénéficiaires (BOI-ENR-DMTG-20-20-20 no 210).
Les donations en pleine propriété de terrains à bâtir signées par acte authentique entre le 1er janvier et le 31 décembre 2015 sont exonérées de droits de donation à concurrence de (CGI art. 790 H et 1840 G ter issu de l'article 8, I de la loi 2014-1654 du 29-12-2014) :
- 100 000 € lorsqu'elles sont consenties en ligne directe (enfants, petits-enfants, notamment) ou entre conjoints (ou partenaires de Pacs) ;
- 45 000 € lorsqu'elles sont consenties au profit d'un frère ou d'une soeur ;
- 35 000 € lorsqu'elles sont consenties au profit d'une autre personne.
Si le montant de l'exonération excède la valeur des biens donnés, le solde d'exonération reste disponible pour toute donation ultérieure de terrain à bâtir éventuellement consentie par le même donateur (BOI-ENR-DMTG-20-20-20 no 500).
L'exonération est subordonnée à l'engagement du donataire, pris dans l'acte pour lui et ses ayants cause, de réaliser et d'achever des locaux neufs destinés à l'habitation dans un délai de quatre ans à compter de la date de l'acte.
Le montant de l'ensemble des donations de terrains à bâtir consenties par un même donateur susceptibles d'être exonérées (quels que soient les bénéficiaires) est plafonné à 100 000 €.
Les donations en pleine propriété d'immeubles neufs à usage d'habitation pour lesquels un permis de construire a été obtenu entre le 1er septembre 2014 et le 31 décembre 2016 sont exonérées de droits de donation à concurrence de 100 000 €, 45 000 € ou 35 000 € selon le lien de parenté entre le donateur et le donataire (comme pour les terrains à bâtir : voir no 30893) (CGI art. 790 I issu de l'article 8, I de la loi 2014-1654 du 29-12-2014). En présence d'un solde d'exonération (valeur du bien donné inférieure au montant de l'exonération), celui-ci reste disponible en cas de donation ultérieure de logement neuf par le même donateur (BOI-ENR-DMTG-20-20-20 no 500).
L'exonération est réservée aux donations signées par acte authentique dans les trois ans de l'obtention du permis de construire. Elle est subordonnée à la double condition que l'acte de donation soit accompagné de la déclaration attestant l'achèvement et la conformité des travaux (C. urb. art. R 462-1) et que l'immeuble n'ait jamais été occupé ou utilisé sous quelque forme que ce soit au moment de la donation.
Le montant de l'ensemble des donations de logements neufs consenties par un même donateur susceptibles d'être exonérées (quels que soient les bénéficiaires) est plafonné à 100 000 €.
Les biens sont évalués selon les mêmes règles que pour les droits de succession, sous les réserves suivantes :
- la résidence principale ne fait l'objet d'aucun abattement ;
- le forfait mobilier de 5 % pour les meubles meublants n'est pas applicable ;
- l'évaluation minimale des bijoux, pierreries, objets d'art ou de collection est de 60 % de la valeur déclarée dans les contrats d'assurance (CGI art. 776), alors qu'elle est de 100 % de cette valeur pour les successions ;
- les valeurs mobilières cotées sont évaluées d'après le cours moyen de la bourse au jour de la donation, ou au cours de clôture de la veille (BOI-ENR-DMTG-20-30-10 no 60).
A noter également qu'une procédure de rescrit-valeur est ouverte aux dirigeants d'entreprise (individuelle ou société) qui envisagent de donner tout ou partie de leur entreprise ou des titres qu'ils possèdent (LPF art. L 18 et LPFR 18-1). Cette procédure leur permet de consulter par écrit l'administration fiscale sur la valeur vénale des biens qu'ils souhaitent donner. L'administration a six mois pour se prononcer. En cas d'accord exprès sur la valeur proposée, et à condition que la donation intervienne dans les trois mois de cet accord, l'évaluation retenue ne peut pas être remise en cause par l'administration.
En principe, les droits de donation sont calculés sur la valeur brute des biens donnés, sans déduction de la valeur des charges qui les grèvent. Par exemple, une donation à charge de rente viagère est taxée sur le montant donné, sans en déduire la valeur de capitalisation de la rente qui sera versée au donateur.
Par exception, les dettes afférentes aux biens donnés sont déductibles pour le calcul des droits de donation si les conditions suivantes sont réunies (CGI art. 776 bis) :
- la dette doit directement concerner le bien donné (solde de l'emprunt contracté pour acheter le bien, par exemple) ;
- la dette doit avoir été contractée auprès d'une banque, à l'exclusion de tout autre prêteur. Par exception, si la donation porte sur une entreprise individuelle, le prêteur peut être une personne autre qu'un établissement de crédit (avec cependant des restrictions, les prêts familiaux ou émanant du bénéficiaire de la donation restant exclus) ;
- l'acte de donation doit expressément prévoir la prise en charge de la dette par le bénéficiaire de la donation ;
- la prise en charge de la dette par le bénéficiaire de la donation doit être notifiée au créancier du donateur.
Si ces conditions ne sont pas réunies, la dette n'est pas déductible et les droits de donation sont calculés sur la valeur brute des biens donnés (CGI art. 758 et CGI761).
L'administration peut demander au donataire de justifier qu'il a bien payé les dettes mises à sa charge. Elle peut exiger cette preuve jusqu'à la fin de la 3e année qui suit celle de l'échéance de la dette (soit, le cas échéant, bien au-delà du délai de prescription). Elle peut également demander des justifications au sujet des dettes mises à la charge du donataire dans l'acte de donation. En l'absence de réponse ou en cas de réponse insuffisante, l'administration peut rectifier à la hausse les droits de donation, selon la procédure de rectification contradictoire (BOI-ENR-DMTG-20-30-10 no 260).
Un appartement de 500 000 € est donné par un père à son fils à charge pour ce dernier de rembourser les 100 000 € restant dus sur l'emprunt bancaire. A condition que cette prise en charge figure dans l'acte de donation et soit notifiée à la banque, les droits de donation seront calculés sur 400 000 €, et non sur 500 000 €. La taxe de publicité foncière reste due sur la valeur brute de l'appartement, soit 500 000 €.
Les droits de donation sont calculés sur la part de chaque donataire dans l'actif donné, après réintégration le cas échéant des donations consenties depuis moins de 15 ans au même donataire (règle du rappel fiscal des donations antérieures, qui s'applique comme pour le calcul des droits de succession et avec les mêmes exceptions : voir nos 30743 s.).
Le calcul des droits comporte l'application d'abattements, d'un tarif et de réductions de droits.
Les donations bénéficient comme les successions des abattements prévus :
- en ligne directe, entre frères et soeurs et en faveur des neveux et nièces (voir no 30750) ;
- ainsi qu'en faveur des handicapés (voir no 30755).
Elles ne bénéficient pas des autres abattements prévus en matière de succession, mais profitent d'abattements spécifiques dont le montant est le suivant :
- 80 724 € pour les donations entre époux ou partenaires de Pacs (CGI art. 790 E). Pour les donations entre partenaires de Pacs, l'abattement est remis en cause en cas de rupture du Pacs dès l'année de sa conclusion ou au cours de l'année suivante pour un motif autre que le mariage entre les partenaires ou le décès de l'un d'eux (CGI art. 790 F) ;
- 31 865 € pour les donations aux petits-enfants (CGI art. 790 B) ;
- 5 310 € pour les donations aux arrière-petits-enfants (CGI art. 790 D).
Ajoutons que, sous certaines conditions, les donations d'entreprises aux salariés bénéficient d'un abattement de 300 000 € (montant fixe) sur la valeur du fonds ou de la clientèle (ou sur la fraction de la valeur des parts ou actions représentative du fonds ou de la clientèle) (CGI art. 790 A).
Les donations en ligne directe, en ligne collatérale (entre frères et soeurs, entre oncles et tantes et neveux et nièces, entre cousins et cousines), de même qu'entre personnes sans lien de parenté (concubins non pacsés, par exemple) sont soumises aux mêmes tarifs que les successions : voir nos 30782 s.
Si la donation est faite à plusieurs bénéficiaires, le tarif s'applique distinctement à chacun d'eux. De même, s'il y a plusieurs donateurs, le père et la mère par exemple, les droits sont calculés distinctement sur les biens donnés par chacun d'eux.
Les donations entre époux et partenaires de Pacs sont soumises au tarif suivant (CGI art. 777, tableau II).
Taux par tranche de part taxable |
Part taxable après abattement (P) |
Montant cumulé des droits |
---|---|---|
5 % |
N'excédant pas 8 072 € |
P × 0,05 |
10 % |
Entre 8 072 € et 15 932 € |
(P × 0,1) - 404 € |
15 % |
Entre 15 932 € et 31 865 € |
(P × 0,15) - 1 200 € |
20 % |
Entre 31 865 € et 552 324 € |
(P × 0,2) - 2 793 € |
30 % |
Entre 552 324 € et 902 838 € |
(P × 0,3) - 58 026 € |
40 % |
Entre 902 838 € et 1 805 677 € |
(P × 0,4) - 148 310 € |
45 % |
Au-delà de 1 805 677 € |
(P × 0,45) - 238 594 € |
Les réductions de droits pour charges de famille et celle des mutilés de guerre sont celles applicables en matière de droits de succession.
Il existe une seule réduction de droits spécifique aux donations d'entreprises : à condition que le donateur ait moins de 70 ans, les donations en pleine propriété d'entreprises individuelles ou de parts ou actions de sociétés qui remplissent les conditions de l'exonération de 75 % prévue en faveur des transmissions d'entreprises bénéficient d'une réduction de droits de 50 % (sans limitation de montant) (CGI art. 790).
Les droits sont payables au comptant. Il n'est pas possible d'obtenir des délais de paiement (sauf exception en faveur des transmissions d'entreprise).
Les modes de paiement sont les mêmes que pour les droits de succession.
Les droits sont à la charge du donataire, c'est-à-dire du bénéficiaire de la donation (sur le caractère facultatif de cette règle, voir no 29443). Lorsque la donation est constatée par acte notarié, les droits sont acquittés par l'intermédiaire du notaire, à qui il incombe de présenter l'acte à l'enregistrement. Le notaire y ajoute ses propres honoraires, calculés comme indiqué plus haut no 29436.
Pour les dons manuels, voir nos 29500
Les donations d'immeubles outre les droits de donation donnent lieu au paiement de la taxe de publicité foncière (au taux de 0,60 % auquel s'ajoutent des frais, soit un taux global de 0,61422 %) assortie de la contribution de sécurité immobilière (au taux de 0,10 %). L'ensemble est payé simultanément, par l'intermédiaire du notaire. Celui-ci procède à la formalité fusionnée de l'enregistrement et de la publicité foncière auprès du service chargé de la publicité foncière du lieu de l'immeuble (CGI art. 647).
Comme les droits de succession, les droits de donation sont soumis au contrôle de l'administration (avec les mêmes délais, sachant que la procédure de contrôle sur demande est également applicable aux actes de donation). Celle-ci peut en particulier mettre en oeuvre la procédure de rectification contradictoire pour corriger les insuffisances qu'elle constate dans l'évaluation des biens transmis et appliquer les pénalités correspondantes : intérêt de retard de 0,40 % par mois et, s'il y a lieu, pénalités pour manquement délibéré (mauvaise foi). Si elle soupçonne qu'une opération, une vente par exemple, recouvre une donation déguisée, elle pourra même user de la procédure de répression des abus de droit.
De son côté, s'il s'estime taxé à tort, le contribuable peut exercer un recours contentieux en déposant une réclamation préalable auprès de l'administration.
Le 15 mai 2015, Monsieur Leblanc et son épouse font une donation-partage à leurs deux enfants, Pierre et Jacques. Pierre a deux enfants et Jacques trois enfants. Il n'y a pas eu de donation antérieure au cours des 15 années précédentes.
La donation-partage porte sur les biens suivants, tous donnés en pleine propriété : biens de communauté, 260 000 € ; biens propres de Monsieur Leblanc (outre 31 865 € en numéraire pour chaque enfant), 220 000 € ; biens propres de Madame Leblanc (outre 31 865 € en numéraire pour chaque enfant), 290 000 €. Total (non compris les sommes d'argent exonérées) : 770 000 €, soit 385 000 € à chaque enfant.
Les biens donnés par Monsieur Leblanc s'élèvent à : 130 000 € (1/2 communauté) + 220 000 € (biens propres) = 350 000 €, soit 175 000 € pour chaque enfant.
Les biens donnés par Madame Leblanc s'élèvent à : 130 000 € (1/2 communauté) + 290 000 € (biens propres) = 420 000 €, soit 210 000 € pour chaque enfant.
1o Droits dus par Pierre : |
|
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a. Biens donnés par le père : |
175 000 € |
|
abattement : |
- 100 000 € |
|
somme taxable : |
= 75 000 € |
|
dû : |
13 194 € |
|
b. Biens donnés par la mère : |
210 000 € |
|
abattement : |
- 100 000 € |
|
somme taxable : |
= 110 000 € |
|
dû : |
20 194 € |
|
Total dû par Pierre : 13 194 € + 20 194 € = 33 388 €. |
|
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2o Droits dus par Jacques |
|
|
a. Biens donnés par le père : |
175 000 € |
|
abattement : |
- 100 000 € |
|
somme taxable : |
= 75 000 € |
|
droits dus : |
13 194 € |
|
réduction de droits pour charges de famille : |
- 610 € |
|
dû : |
= 12 584 € |
|
b. Biens donnés par la mère : |
210 000 € |
|
abattement : |
- 100 000 € |
|
somme taxable : |
= 110 000 € |
|
droits dus : |
20 194 € |
|
réduction de droits pour charges de famille : |
- 610 € |
|
dû : |
= 19 584 € |
|
Total dû par Jacques : 12 584 € + 19 584 € = 32 168 €. |
||
Total général des droits de donation exigibles : 33 388 € + 32 168 € = 65 556 €. |
Avec l'étude des donations, on a déjà indiqué différents moyens de réduire les droits de donation : faire payer les droits par le donateur plutôt que par le bénéficiaire de la donation ; utiliser à bon escient les dons manuels ; pour des parents qui veulent donner un bien à leur enfant marié, ne pas donner au couple mais seulement à leur enfant avec, le cas échéant, une clause d'entrée en communauté, etc. Le recours à une société civile permet également de réduire le coût fiscal de la transmission d'un patrimoine, la donation portant sur les parts de la société et non sur les biens détenus par celle-ci.
Il n'est pas question de revenir ici sur ce qui a déjà été expliqué, mais plutôt d'insister sur certains aspects pratiques importants.
A hauteur des abattements, les donations échappent à l'impôt. Il peut notamment être donné :
- 100 000 € à ses enfants ;
- 31 865 € à ses petits-enfants ;
- 5 310 € à ses arrière-petits-enfants ;
- 159 325 € aux handicapés, cet abattement étant indépendant du degré de parenté avec le donateur et s'ajoutant aux abattements personnels dont peuvent bénéficier les enfants, petits-enfants et arrière-petits-enfants.
L'abattement s'applique distinctement aux biens donnés par les différents donateurs à un même bénéficiaire. Les donations consenties par les deux parents à leurs enfants permettent ainsi de doubler la valeur transmissible en franchise d'impôt.
Prenons une famille de trois enfants. En mai 2015, chaque parent peut transmettre à ses enfants en exonération 100 000 € × trois enfants = 300 000 €, soit pour les deux parents 600 000 €. Et si les parents donnent également de l'argent (donation exonérée à concurrence de 31 865 €), l'exonération peut atteindre (100 000 € + 31 865 €) × trois enfants × deux parents = 791 190 €. Chaque couple de grands-parents peut également transmettre à ses petits-enfants en franchise d'impôt des biens pour 191 190 € (soit 31 865 € × trois petits-enfants × deux grands-parents), et jusqu'à 382 380 € en cas de donation de sommes d'argent.
Donations et successions font partie d'une même catégorie, celle des mutations à titre gratuit qui forment un tout du point de vue fiscal. Il en résulte que lorsqu'elles interviennent au profit d'un même bénéficiaire, un héritier le plus souvent, les transmissions effectuées par donation, du vivant du donateur, et celle qui s'opère à son décès sont globalisées pour le calcul des droits. C'est la règle dite du rappel fiscal que nous avons exposée plus haut. Ce rappel influence aussi bien le calcul des abattements que celui des droits progressifs et des réductions de droits. En ce qui concerne le barème, il a mécaniquement pour effet de taxer les nouvelles transmissions dans les plus hautes tranches, comme le montre l'exemple du no 30746.
Mais cette règle du rappel fiscal comporte deux exceptions. L'une, ponctuelle, concerne les dons familiaux de sommes d'argent exonérés. S'ils sont déclarés, ces dons échappent définitivement au rappel fiscal.
La seconde exception à la règle du rappel fiscal est d'application générale ; elle bénéficie à toutes les donations consenties depuis 15 ans, à la condition que ces donations aient été enregistrées ou déclarées. Autrement dit, 15 ans après une donation, tout se passe comme si elle n'avait pas eu lieu, les compteurs fiscaux étant remis à zéro. A l'occasion d'une nouvelle donation ou de la succession du donateur, ceux qui avaient déjà bénéficié d'une donation retrouvent l'abattement intégralement disponible, se voient appliquer le barème en partant du taux le plus bas et ont droit s'il y a lieu à la réduction d'impôt pour enfants.
Ce système peut aboutir à transmettre, au fil du temps, des sommes très importantes, soit en franchise totale de droits si les abattements sont suffisants, soit moyennant une taxation atténuée par l'utilisation successive des premières tranches du barème.
La donation avec réserve d'usufruit, qui permet à celui qui donne de conserver la jouissance des biens donnés, présente aussi l'intérêt de réduire la base d'imposition. En pareil cas, en effet, les droits ne portent que sur ce qui est transmis, c'est-à-dire la valeur de la nue-propriété. De ce fait, le montant des droits est inférieur à ce qu'il serait si la donation était consentie en pleine propriété. En outre, l'usufruit échappe définitivement à l'impôt car, au décès de l'usufruitier, il est récupéré par le nu-propriétaire en franchise de droits de succession, tout au moins - s'agissant de donations à un héritier ou légataire - lorsque la donation a acquis date certaine plus de trois mois avant le décès.
Mais attention : si l'usufruit est converti en rente viagère et si cette faculté était prévue dans l'acte de donation, l'administration considère que la conversion constitue un complément de donation avec charge, passible des droits de donation sur la valeur de l'usufruit au jour de la conversion. Si la conversion de l'usufruit intervient alors qu'elle n'avait pas été prévue dans l'acte de donation, elle est passible des droits de donation si l'administration peut démontrer l'intention de donner. Dans le cas contraire, ce sont les droits de vente qui sont dus sur la valeur en capital de la rente (BOI-ENR-DMTG-20-10-10 nos 170 et 180).
Cette formule intéresse les donateurs qui disposent de biens porteurs d'importantes plus-values latentes qui, si elles étaient réalisées, seraient soumises à l'impôt sur le revenu ainsi qu'à la CSG et autres prélèvements sociaux (par exemple, un immeuble locatif détenu depuis plusieurs années).
Si vous êtes dans cette situation et si vous avez l'intention de consentir une donation, évitez l'opération qui consisterait à vendre les biens pour donner le produit de la vente. Vous avez fiscalement tout intérêt à procéder dans l'ordre inverse, c'est-à-dire à donner directement les biens, en laissant aux bénéficiaires le soin de les vendre eux-mêmes s'ils ont besoin de disponibilités. Vous éviterez ainsi la taxation des plus-values. En cas de revente à bref délai des biens reçus, les bénéficiaires de la donation ne supporteront pas non plus l'impôt sur la plus-value, ou ne seront que légèrement imposés, car leurs plus-values, calculées par rapport à la valeur déclarée pour la donation, seront faibles ou nulles.
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